Isola Tremblay tire sa révérence – Un chapitre de l’histoire de Longue-Rive est tourné

Par Shirley Kennedy 8 mars 2018
Temps de lecture :
La Fabrique St-Paul de Longue-Rive et la chorale ont souligné l’accomplissement de madame Isola. À l’avant, elle est entourée de sœur Marguerite Paquin et sœur Carmen Desmeules, ses amies de toujours, et Yvonnette Tremblay. Ensuite de gauche à droite: Marie-Soleil Dugas, Julie Petitpas, Rolande Tremblay, Gladys Martel, Pierre Tremblay, Clémence Gagnon, Nicole Dugas, Guy Tremblay, Chantale Dugas, Henriette Émond, Ginette Laprise, Sylvie Dugas et Monique Gagnon. Photo courtoisie/Marie-Soleil Dugas

La Fabrique St-Paul de Longue-Rive et la chorale ont souligné l’accomplissement de madame Isola. À l’avant, elle est entourée de sœur Marguerite Paquin et sœur Carmen Desmeules, ses amies de toujours, et Yvonnette Tremblay. Ensuite de gauche à droite: Marie-Soleil Dugas, Julie Petitpas, Rolande Tremblay, Gladys Martel, Pierre Tremblay, Clémence Gagnon, Nicole Dugas, Guy Tremblay, Chantale Dugas, Henriette Émond, Ginette Laprise, Sylvie Dugas et Monique Gagnon. Photo courtoisie/Marie-Soleil Dugas

Forestville – Le 31 décembre 2017, à l’aube de la nouvelle année et à l’approche de son 80e anniversaire, Isola Tremblay a fait résonner pour la dernière fois les notes de l’orgue de l’église St-Paul de Longue-Rive. Après 65 ans à la direction de la fameuse chorale de St-Paul, celle que l’on appelle respectueusement madame Isola, a décidé de donner un repos bien mérité à ses mains de musicienne.

De son banc d’organiste, madame Isola a assuré avec dévouement et passion, les messes dominicales, services funèbres et autres cérémonies célébrées à l’église St-Paul pendant 65 ans.

Mais la mesure du temps faisant son œuvre implacablement, elle a dû se résigner à quitter son banc « définitivement », ses mains n’ayant plus la dextérité d’autrefois. « Mes doigts ne veulent plus fonctionner, ça m’a forcée un peu à arrêter », dit-elle, la voix étranglée par l’émotion.

C’est en 1953, après un an d’enseignement de piano auprès des sœurs du Bon-Conseil du couvent de St-Paul-du-Nord, que madame Isola devient l’organiste de la chorale de St-Paul-du-Nord, où elle rejoint son père Joseph Tremblay. « C’est mon père qui chantait à la maison, il a fait partie de la chorale près d’une cinquantaine d’années ».

Pendant environ une décennie, elle sera la seule femme de la chorale, composée exclusivement d’hommes, « de belles voix masculines comme celles des Hovington ou Edgar Gagné », dit-elle. « Il y avait dix hommes qui chantaient dans la chorale. Et dans ce temps-là, c’était des chants grégoriens que le curé de l’époque, le curé Audet, leur enseignait. C’était vraiment différent, ce n’était pas la même musique ni les mêmes portées», se remémore avec nostalgie madame Tremblay.

Chanter en harmonie

Au fil des ans, madame Isola a contribué à la pérennité et au rayonnement de la chorale de St-Paul. Des pratiquants des villages voisins font le détour, lors des messes de Noël entre autres, pour entendre les voix mélodieuses de la chorale de St-Paul. « Moi je ne chante pas. Je suis capable de montrer n’importe lequel chant mais je ne suis pas une chanteuse », tient-elle à préciser.

Embêtée parfois par la maladie, la directrice de la chorale est fidèle au poste, beau temps mauvais temps. « Toujours de bonne humeur », ajoute Julie Petitpas, qui a côtoyé madame Isola pendant 35 ans. Pour rappeler ses « ouailles » à l’ordre, madame Isola use d’un stratagème bien à elle, « et qui fonctionne à tout coup », dira Mme Petitpas. « J’ai vécu beaucoup d’affaires, mais il n’y a jamais eu de discorde au sein de la chorale. Pour les faire taire, j’appuyais les deux bras sur le clavier et ils savaient ce que ça voulait dire », avoue la principale intéressée en riant.

Doux souvenirs

Parallèlement à son emploi de maître de poste qu’elle a occupé pendant 46 ans, et la direction de la chorale, qui à certains moments comptait plus de 50 membres, madame Isola dispense des leçons de piano chez-elle. Une centaine d’élèves défileront dans son salon au cours de ces 30 années, dont l’illustre chanteuse d’opéra Guylaine Girard et la journaliste Pascale Bouchard, qui a grandi à Longue-Rive et fut très heureuse de constater par le biais des médias sociaux en direct de chez-elle à Saskatoon, qu’un hommage a été rendu à madame Isola. « La force tranquille de madame Isola, son calme, son talent, son dévouement, sa gentillesse, sa patience, tout ça mérite grandement d’être reconnu, » souligne Pascale. Quand j‘étais petite, il y avait une messe le samedi soir et le dimanche matin. Elle n’était jamais absente. Toute la paroisse pouvait toujours compter sur elle pour les mariages, les funérailles, les premières communions, les semaines saintes et toutes les pratiques de la chorale. Elle était toujours là, au piano ou à l’orgue. Et quel bonheur de l’entendre, comme si toutes ces mélodies jouaient toutes seules du bout de ses doigts !» En plus d’avoir fait partie de la chorale pendant toute sa jeunesse, Pascale Bouchard a été pendant une dizaine d’années, une élève de piano de madame Isola. « Un professeur exceptionnel dit-elle. Elle n’était pas particulièrement sévère comme professeur de piano, jamais elle n’a élevé la voix. Mais je savais ce qu’elle attendait de moi. Elle aimait le travail bien fait, et faisait rapidement comprendre à ses élèves qu’on ne devient pas bon pianiste sans un effort rigoureux et constant ».

Pascale Bouchard est revenue l’été dernier rendre visite à madame Isola à Longue Rive. Une visite où elle était fière de la présenter à sa fille de 8 ans Maïka-Rose, elle-même élève de piano depuis 4 ans. « Si ma fille continue de développer son talent de pianiste, il y aura toujours un peu de la passion de madame Isola au bout de ses doigts et je voulais que les deux se rencontrent » dit-elle.

Parmi les moments marquants au sein de la chorale, madame Isola se plaît à se remémorer le jour où le curé avait décidé de descendre l’orgue au beau milieu de l’église. « C’était un nouveau curé et il a dit : on enlève l’orgue du jubé et on la descend en bas. Ça ne faisait pas mon affaire et je trouvais que ça ne se faisait pas. Finalement il a décidé de remonter l’orgue au jubé quelques temps après ».

Un autre chapitre

Depuis le 31 décembre dernier, madame Isola n’a plus déposé ses doigts fragiles sur un clavier. Elle se rend à l’église lors des messes ou services funèbres, où la chorale chante toujours « À capella ». L’organiste de Portneuf-sur-Mer, Katia Létourneau, s’y rend à l’occasion pour les services funèbres. « C’est une denrée rare vous savez un organiste et c’est très prenant aussi ».

Il y a quelques semaines, la Fabrique St-Paul de Longue-Rive et la chorale ont organisé une petite fête pour madame Isola afin de souligner ses 65 ans d’accomplissement au sein de la chorale et ses 80 ans à venir (le 27 février). En présence d’une vingtaine de personnes dont ses deux grandes amies, « ses anges », comme le dit si bien Julie Petitpas, sœur Margot et sœur Carmen, madame Isola a pu dire au revoir à ses amies. Une fête d’amour et de partage pour cette grande dame qui à sa façon, sans tambour ni trompettes, a marqué l’histoire de St-Paul-du-Nord aujourd’hui Longue-Rive.

Partager cet article