Merci de prendre le temps

Par Erika Soucy 27 novembre 2018
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Chères lectrices, chers lecteurs,

Il y a quelques semaines, Shirley Kennedy m’a écrit sur Facebook le message suivant :

J’espère que tu vas bien et ta petite famille aussi. Je sais que tu es très occupée, mais comme le disait ma grand-mère Germaine : « Qui ne risque rien, n’a rien ». J’aimerais bien avoir une chronique d’humeur ou une chronique tout court d’Erika Soucy dans le journal. Vite de même, est-ce que ça pourrait t’intéresser?

Shirley m’a dit que cette première chronique doit servir à me présenter. Que dire de moi? Je suis née à Portneuf-sur-Mer et j’écris de la poésie, du roman, de la télé; des chroniques radio aussi. Dans mes textes, je parle souvent de la Haute-Côte-Nord qui m’habite, même si je n’y habite plus.

Mais ça, c’est de l’information plate, ordinaire. Pour l’essentiel et l’extraordinaire, je vous donne rendez-vous dans ces pages, aux deux semaines, où je prendrai le temps de rendre hommage à notre coin de pays, nos villages, nos gens. Avoir une tribune pour parler de nous, chez nous, c’est un cadeau que j’attendais depuis longtemps.

C’est pour ça que je n’ai pas hésité longtemps avant d’accepter l’invitation de Shirley. Il faut dire aussi qu’elle a sorti l’artillerie lourde ! M’accrocher drette en partant avec une citation de Memére Dédé, c’était s’assurer de fesser fort.

Ah! Ha! Je vous entends déjà, monde de Portneuf, dire que je suis bien que trop jeune pour avoir connu Germaine Kennedy. Détrompez-vous ! Je l’ai connu comme une grand-mère qui n’était pas la mienne, dans sa maison située juste en face de la nôtre quand on restait au boute du village. Je ne compte pas le nombre de fois où ma mère m’a fait traverser la 138 pour que j’aille piger dans son jardin : de la salade, des carottes, de la rhubarbe; pour que j’aille jouer de l’orgue électronique dans son salon. Je me rappelle encore du bruit des lampes qui se réchauffent. Je ne compte plus les minutes passées à la regarder coudre dans son sous-sol, petite Erika camouflée dans le gros pouf-poire. Accueillante et généreuse, Memére Dédé ne m’a jamais fait croire que je la dérangeais.

Je garde d’elle le souvenir d’une femme noble. Il me semble que les années de devoir n’ont jamais réussi à effacer sa douceur. Adulte, j’ai appris qu’elle avait ses secrets, sa souffrance, qu’elle gardait bien cachés sous ses tâches quotidiennes. N’empêche… Memére Dédé, c’était pour moi un sentiment de sécurité; le silence et le temps qui n’exigeaient pas d’être comblés.

Shirley savait bien, en m’écrivant, que j’avais un horaire de fou; mais moi j’ai su, à la simple évocation de Germaine, que le temps méritait que je le trouve.

Merci de prendre le temps de me lire.

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