Une nouvelle zone de protection dans le golfe du Saint-Laurent

Par Emelie Bernier 5:00 AM - 21 juin 2019
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La Malbaie – L’accès à 44 % de la superficie du parc marin du Saguenay–Saint-Laurent sera interdit aux opérateurs d’excursions commerciales aux baleines, un signal clair en faveur des bélugas selon les scientifiques.

Le secteur visé par les nouvelles mesures s’étend de la pointe au Bouleau à Baie-Sainte-Catherine jusqu’à Gros Cap-à-l’Aigle dans Charlevoix. Il est situé dans l’estuaire moyen, un secteur particulièrement prisé par les bélugas, principalement les femelles et leurs petits qui utilisent intensivement cette partie de l’estuaire du parc marin du Saguenay–Saint-Laurent (PMSSL).

Au Groupe de recherche et d’éducation sur les mammifères marins (GREMM), on se réjouit de cette annonce. «Ce n’est pas avec cette annonce qu’on va sauver les bélugas, mais ça envoie le message que la conservation n’est pas une crise de 2019. On dit au monde entier qu’on préserve une partie importante de l’habitat des femelles et des jeunes d’une des activités qui les perturbent. Ça s’ajoute à d’autres mesures importantes déjà en place», analyse Robert Michaud, directeur scientifique de l’organisation. Il cite l’exemple du 400 mètres de distance règlementaire que les bateaux doivent respecter entre eux et les mammifères marins de l’estuaire.

Le son de cloche est aussi positif à Parcs Canada. «On est très fier de faire des gains sur les facteurs qu’on peut contrôler, car il y en a plusieurs qu’on ne contrôle pas comme les changements climatiques, les niveaux de contaminants déjà déversés, par exemple », commente Nadia Ménard, biologiste pour Parcs Canada au PMSSL. La mise en place de ce qu’elle appelle des « aires de quiétude » pour le béluga est le fruit d’un travail de collaboration importante. «On travaille tous ensemble, car on souhaite tous que dans 20, 30 ans, on puisse rétablir la population de bélugas qui décline bien que la chasse ait cessé en 1979 », indique-t-elle.

Ni les plaisanciers ni les transporteurs maritimes ne sont visés par cette restriction qui vise à offrir davantage de quiétude aux bélugas, mais d’autres mesures s’adressant à ces usagers sont en pourparlers et pourraient être mises en application bientôt, comme l’indique Nadia Ménard, biologiste au PMSSL.

«On a commencé à parler avec la navigation marchande et l’industrie maritime s’est montrée intéressée. On ne bloque pas le trafic maritime, mais est-ce qu’il y aurait des façons de minimiser les impacts dans les secteurs clés de l’alimentation des baleines? Est-ce que les routes de navigation pourraient être légèrement déplacées? C’est à voir, mais il y a une ouverture et c’est positif. Les utilisateurs maritimes sont conscients qu’ils ont une part à jouer », indique Mme Ménard.

Les projets industrialo-portuaires font aussi l’objet d’une attention particulière, tant au PMSSL qu’au GREMM. «Chacun des projets est susceptible d’augmenter considérablement le trafic dans l’habitat du béluga et si ces projets vont de l’avant et que les bruits explosent, il faudra trouver des solutions. C’est notre plus grand enjeu », conclut Robert Michaud.

On estime qu’environ le quart du cheptel de bélugas du Parc marin Saguenay–Saint-Laurent, dont il subsiste moins de 900 individus et qui connaît un déclin de 1% par année, occupe le secteur visé par la nouvelle restriction.

Les bateliers dans le coup

La mesure de conservation n’étonnera pas les croisiéristes puisqu’elle a été développée en partenariat avec les neuf entreprises qui offrent des excursions aux baleines dans le parc marin. Cette mesure fait partie d’une vaste démarche sous l’égide du Règlement des activités en mer pour protéger les bélugas dont la population décline d’année en année. « Toutes les entreprises de l’Alliance ont été consultées. On l’a fait ensemble, de notre plein gré, car en bout de ligne, on veut protéger la ressource », indique Lucie Charland, directrice générale adjointe chez Croisières AML porte-parole des bateliers de l’alliance. « Si on n’a plus de bélugas, c’est notre activité qui est en péril. Il faut en prendre soin », conclut-elle.

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