Nouveau rôle d’évaluation foncière à Forestville : des propriétaires dénoncent une « hausse exagérée »

Le mois de mars rime avec l’arrivée du printemps mais symbolise aussi pour plusieurs contribuables, la période de déclarations de revenus ainsi que la réception des comptes de taxes municipales et scolaires. Pour certains propriétaires de Forestville, le dépouillement du courrier leur a permis de constater que leur propriété avait pris de la valeur depuis l’an dernier.

Pierre Demers et sa famille habitent une maison modulaire récente érigée rue Marcellin, dans le parc Vincent. Il affirme que l’évaluation de sa résidence a connu une hausse de 45% par rapport à l’an dernier.

« L’an dernier notre maison était évaluée à 99 000 $ et cette année elle est à 145 000 $. Et la seule amélioration que j’ai fait, c’est une petite rallonge de 16 X 16 », déplore-t-il.

L’homme d’affaires conçoit l’engouement pour les maisons mobiles de son secteur, un accès à la propriété très prisé qui demeure presqu’aussi abordable qu’un loyer.

« Je trouve que ça ne représente pas le marché de Forestville. Nous n’avons pas d’industrie, ce n’est pas le plein emploi et les propriétaires qui habitent le parc ne sont pas très riches, c’est inconcevable de surévaluer comme ça, surtout dans le parc », lance M. Demers, qui a déjà signalé son intention de faire une demande de révision à la MRC de La Haute-Côte-Nord.

D’autant plus ajoute-t-il, qu’il a en main le travail d’un évaluateur privé auquel il a eu recours alors qu’il négociait son prêt hypothécaire il y a quatre ans.

« Il a évalué ma résidence à 118 000 $ alors que la MRC estime aujourd’hui qu’elle vaut 145 000 $. On s’est battus lors de l’achat pour obtenir un prêt selon l’évaluation et là on se bat pour être évalués selon le marché de Forestville, c’est le monde à l’envers ».

Même son de cloche du côté de la rue Martel. Un propriétaire dont l’évaluation de la résidence aurait subi une hausse de 30 %, prétend que l’évaluation est faite arbitrairement par un employé de la MRC qui n’est pas un évaluateur agrée.

« Ils comparent des pommes avec des poires. Nous n’avons même pas d’égout pluvial dans la rue Martel. Un évaluateur agrée va regarder autour, il va tenir compte de l’environnement, du voisinage », précise celui qui désire garder l’anonymat.

Hausse du rôle

Tandis que l’évaluation foncière est une responsabilité dévolue aux MRC, le taux de taxation est du ressort de chaque conseil municipal.

Afin de réduire les impacts liés au nouveau rôle d’évaluation, les élus forestvillois ont convenu de réduire de 0,01 $ le taux de base du 100$ d’évaluation (1,62 $ du 100 $ d’évaluation à 1,61 $).

« Il y a eu beaucoup d’améliorations à Forestville au cours des dernières années et c’est tout à fait normal que le rôle d’évaluation augmente. Nous avons des édifices qui ont subi des rénovations majeures, dont notamment le CLSC, la polyvalente des Rivières, l’école St-Luc, etc. En général, la valeur des résidences a été rehaussée de 27 % alors que l’impact sur le compte de taxes des propriétaires représente une hausse de 18 % », affirme la mairesse de Forestville Micheline Anctil.

Rappelons qu’à tous les trois ans, les Municipalités se voient attribuer un nouveau rôle d’évaluation réalisé par la Direction du service d’évaluation de la MRC et un évaluateur agrée, ceci supervisé par l’Ordre des évaluateurs du Québec.

Déposé en 2020 mais réalisé en 2019, le rôle d’évaluation de Forestville est passé de 155 244 900 $ l’an dernier, à 163 370 000 $.

Au moment d’aller sous presse, une vingtaine de propriétaires forestvillois avaient signé le document à cet effet mis à leur disposition au bureau d’accueil de l’Hôtel de Ville. Ces derniers ont jusqu’au 30 avril prochain pour signifier leur intention.

« Les maisons mobiles se vendent 15 % plus cher que leur évaluation » – Josée Girouard

En entrevue au Journal Haute-Côte-Nord, la directrice du Service d’évaluation foncière de la MRC de La Haute-Côte-Nord, Josée Girouard, confirme qu’au cours des trois dernières années, la trentaine de maisons mobiles du parc Vincent a trouvé preneur à un coût de 15 % plus élevé que l’évaluation.

« En général elles se vendaient 50 000 $. Depuis quelques années, elles se vendent en moyenne 75 000 $ », dit-elle.
Les critères relevés par son service sont : l’année de construction, l’entretien et la qualité de la propriété.

« Avant c’était du quantitatif, maintenant c’est du qualitatif, ajoute-t-elle. Les gens ont comme réflexe que les maisons ne se vendent pas à Forestville. Mais les transactions qui sont conclues sont de bonnes transactions, ça dépend des secteurs ».

Pour madame Girouard qui évolue au Service d’évaluation foncière de la MRC depuis 33 ans, il n’y a pas là de quoi fouetter un chat. « Nous avons une liste à rappeler d’à peu près 20 personnes pour une demande de révision. J’ai déjà vu des années à 100-150 dossiers ».

Chiffres à l’appui, la directrice du Service d’évaluation foncière de la MRC affirme que son service a augmenté le rôle d’évaluation de Forestville de 5 % tandis que de par leur champ de compétence, les élus de Forestville ont réduit le taux de taxation de base de 3 %. Ce sont eux qui décident, la MRC n’a pas de contrôle là-dessus ».

À chaque nouveau rôle, madame Girouard et son équipe font une présentation aux élus de la tendance du rôle à venir. Et dans le sommaire du rôle, sont expliquées les valeurs moyennes par unité de logement.

« C’est un bon indicateur puisqu’on compare par municipalité. Chaque municipalité a son étude et le marché est sondé 18 mois avant le rôle. Donc le rôle de 2021 a été effectué au 1er juillet 2019, ce qui signifie que les ventes qui ont été conclues après cette date n’ont pas été prises en considération ».

Évaluation d’une résidence moyenne unifamiliale par municipalité en 2021