Sous le Shaputuan de passage à l’école Marie-Immaculée des Escoumins

Par Renaud Cyr 12:00 PM - 20 septembre 2022
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Une classe de l’école Marie-Immaculée des Escoumins réunie sous le shaputuan, s’initie à la culture innue. Photo : courtoisie

L’activité Sous le Shaputuan, présentée par l’Institut Tshakapesh de Sept-Îles s’est tenue toute la semaine dernière dans la cour de l’école primaire Marie-Immaculée des Escoumins. Des ateliers et des discussions, tenues autour du poêle à bois à l’intérieur de l’habitation traditionnelle innue, initient les participants à la culture et au mode de vie des Innus.

« Ça faisait deux ans que j’essayais de les faire venir, mais malheureusement avec les mesures sanitaires en vigueur il était impossible de distancier suffisamment les participants à l’intérieur du shaputuan », explique Isabelle Elliott, enseignante de culture innue à l’école Marie-Immaculée des Escoumins.

« Le nombre maximum de participants est de 30, mais même quand nous ne sommes pas complets on se sent quand même à l’étroit », ajoute-t-elle.

Le bâtiment, construit avec les perches d’épinettes en forme circulaire, possède deux portes aux extrémités et est recouvert de toile. Le sol est jonché de branches diverses qui font office de tapis, et un feu brûle lentement dans le poêle à bois adjacent. C’est dans cet environnement que les différents intervenants prennent la parole.

Une expérience hors du commun

Évelyne St-Onge, Gary McFarland et Martial Fontaine se succèdent pour raconter leur expérience de vie. Transition dans les pensionnats, vie dans la forêt, spiritualité et relations avec les aînés, tout y passe.

C’est avec une résilience étonnante qu’Évelyne St-Onge, originaire de Uashat mak Mani-Utenam, aborde son passage au pensionnat : « Quand on est ressortis de là, on ne connaissait plus notre langue et notre culture, il a fallu tout réapprendre », décrit-elle.

Mme St-Onge raconte les voyages de chasse aux caribous dans le nord du Québec étaient jadis un pilier central du cycle de vie des populations innues. Les périples, qui pouvaient durer des mois, forgeaient par l’entraide et la solidarité, le caractère des clans innus.

Gary McFarland, originaire d’une communauté crie du Manitoba qui réside maintenant avec les Innus, initie pour sa part les participants à la vie spirituelle. Pour lui, le tambour qui sert aux chants traditionnels est un lien avec les esprits, les ancêtres et des plans de réalité alternatifs.

« C’est comme ça que la culture était transmise », explique-t-il après avoir donné un exemple de chant. « Les joueurs de tambours voyaient des orignaux, et s’orientaient vers eux avec les points cardinaux pour aller les chasser», se rappelle-t-il. « C’était comme notre télévision à cette époque-là », ajoute-t-il avec humour.

Lors du passage du Journal, Martial Fontaine n’était pas disponible en raison d’une visioconférence pour dispenser son atelier, et c’est un jeune d’une vingtaine d’années qui a pris la parole.

Lui aussi parlait des épopées en canots sur les rivières du nord du Québec qu’il a recréés. « Là où la rivière se séparait, les ancêtres avaient laissé les perches avec lesquelles ils ramaient contre le courant. C’était intéressant à voir », conclut-il.

Faire tomber les préjugés

Pour Isabelle Elliott, l’événement est un succès. « Les jeunes sont privilégiés de voir ça, c’est une expérience unique », déclare-t-elle. « J’ai eu d’excellents retours jusqu’à maintenant de la part des parents, des élèves du primaire et du secondaire, mais aussi du personnel enseignant », décrit Mme Elliott.

En effet un atelier avait été donné spécialement pour le corps professoral, qui selon Mme Elliott a adoré son expérience. Habituellement les écoles défraient les coûts d’installation et d’exploitation, mais cette fois-ci, c’est le conseil de bande d’Essipit qui a réglé la note, d’un montant avoisinant 2 500 $.

Pour Martial Fontaine, coordonnateur Innu-aitun de l’Institut Tshakapesh, Sous le Shaputuan sert à faire tomber les préjugés afin que les Innus et les Québécois vivent en harmonie. « Après ce qui s’est passé durant la crise d’Oka, <i>Sous le Shaputuan</i> a débuté pour briser les préjugés, se faire connaître en tant que peuple et échanger », déclare-t-il. « On veut vivre en harmonie, nous occupons notre territoire ancestral et on ne s’en ira pas », ajoute-t-il.

L’activité <i>Sous le Shaputuan</i>, qui fait le tour des tous les établissements scolaires de la province, se déplacera à l’Université de Chicoutimi au mois d’octobre, et à Sherbrooke ensuite. « On mise surtout sur la jeunesse », explique Martial Fontaine. «Ils vont transporter ce bagage plus longtemps que les plus vieux, qui ont déjà élevé leurs enfants et vécu leur vie », conclut-il.

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