Mononc’Serge à l’église St-Marc : un spectacle aux antipodes

Par Johannie Gaudreault 12:00 PM - 10 novembre 2022
Temps de lecture :

Le président de la Fabrique St-Marc, Bertrand Gagnon, et un des organisateurs du Festival St-Marc Pardu dans l’bois, Cédric Lavoie, ont collaboré pour offrir un premier spectacle dans l’église.

Sur les airs de Fourrer, Vendeur de bière et Marijuana, Mononc’ Serge ou Serge Robert de son vrai nom, a rocké l’église de St-Marc de-Latour. Même si sa vulgarité peut choquer les oreilles les plus chastes, l’ambiance déjantée faisait oublier qu’on se trouvait dans un lieu sacré.

Une centaine de curieux n’a pas voulu manquer ce rendez-vous des plus inusités auquel l’avaient convié les organisateurs du Festival St-Marc Pardu dans l’bois le 4 novembre. Afin de s’assurer que tout se déroule dans l’ordre, les spectateurs ont d’ailleurs été avertis « de ne pas déranger ceux qui reposent dans le cimetière » derrière le lieu de culte.

Une fois entré dans l’établissement, la décoration, la disposition de la scène et du bar ainsi que l’absence d’objets religieux permettaient de se croire dans n’importe quelle salle communautaire. Les gens présents s’entendaient sur un point : c’était bien aménagé.

Le groupe baie-comois The DeLorean a mis la table à la musique injurieuse de l’oncle Serge en faisant revivre des succès du passé de Led Zeppelin, Muse et même le hit Sunglasses at night de Corey Hart. Tout pour donner envie de chanter et danser en attendant la vedette de la soirée.

Habillé en cosmonaute, Mononc’ Serge a foulé la scène avec ses deux musiciens, Ugo Di Vito à la batterie et Peter Paul à la guitare. Le trio a vite fait comprendre l’univers dans lequel il nous transporterait pendant 1 heure et demie. Il fallait s’attendre à rien de moins qu’un voyage dans l’espace, accompagné d’un chanteur à l’énergie débordante.

« Bienvenue à cette célébration de l’astronomie, de la science-fiction et des créatures monstrueuses telles Darth Vader et Julie Payette », a proclamé l’artiste dont la réputation n’est plus à faire.

Il s’est ensuite lancé dans le dévoilement d’une information que la NASA gardait cachée depuis 1969, le fait que les astronautes de la mission Apollo 11 qui se sont posés sur la Lune ont été déçus de ne pas y trouver de bière.

Un prétexte pour présenter Vendeur de bière, l’un des titres de son plus récent album intitulé L’an 8000. Preuve que l’artiste connu pour ses paroles corsées possède un grand nombre d’admirateurs, la majorité des spectateurs scandaient ses succès avec lui, principalement ses plus anciens.

Il ne fallait pas être trop sensible à la vulgarité pour entendre la foule hurler les paroles de Fourrer, une des pièces les plus populaires de Mononc’Serge qu’il a enregistrée avec le groupe Anonymus. « Fourrer, c’est une fatalité, c’est ma finalité, c’est ma raison d’être », ont-ils chanté en cœur.

Le chanteur n’en est pas à ses balbutiements et ça paraît. Il sait comment faire lever une salle et mettre de l’ambiance. Que ce soit en mettant un verre de shooter sur sa tête ou en s’adressant intimement à ses fans, Serge Robert a cassé la baraque, laissant même les spectateurs sur leur faim à 23 h, après un dernier rappel.

Contrairement à ce qu’on aurait pu penser, il n’y a eu aucun débordement. Les spectateurs ont été respectueux et personne n’a rendu visite aux disparus reposant dans le cimetière.

S’il y a une leçon à retenir de ce premier spectacle dans l’église de Saint-Marc-de-Latour, c’est qu’il n’y a rien d’impossible pour faire revivre les lieux de culte.

Le 4 novembre, l’église était remplie de jeunes adultes qui se sont laissé emporter par les vibrations punk rock de l’Oncle Serge. À quand le prochain show?

L’Église autrement

Le président de la Fabrique St-Marc, Bertrand Gagnon, veut faire l’Église autrement. « L’église, ce n’est qu’un bâtiment, mais l’Église avec un gros E, ça peut se faire partout. C’est à l’intérieur de soi », croit-il.

C’est avec toute cette ouverture d’esprit qu’il souhaite dynamiser l’établissement religieux de sa localité pour le rendre « plus communautaire ». La Fabrique s’est départie « de tous les éléments religieux hormis une croix difficile à retirer sur un meuble », divulgue le président.

Les 25 bancs d’église qui encombraient l’espace ont été mis en vente au coût de 100 $ chacun pour laisser place à des chaises. Mais, « l’église ne ferme pas, assure M. Gagnon. On s’en va vers le communautaire même si ça ne plaît pas à tout le monde. »

Quand des jeunes comme Cédric Lavoie l’approchent pour organiser un show dans l’église, impossible de refuser. « Il m’a avisé que c’était du rock, mais j’étais juste heureux de soutenir l’initiative d’un jeune de la communauté. Ils ne briseront pas les fenêtres et le bâtiment sera rempli. C’est tout ce qui importe », affirme M. Gagnon.

Les célébrations religieuses attirent désormais une dizaine de pratiquants tout au plus. « On arrange la salle pour que ce soit intime et chaleureux. On ajoute des chaises et des paravents. Comme ça, l’église semble moins vide », explique Marjolaine Tremblay, aussi impliquée que son conjoint pour l’organisme.

De plus, il est possible d’adapter le bâtiment à tous les types de location, dont les spectacles comme celui présenté vendredi. « On peut faire la location pour différentes occasions. L’objectif pour nous c’est d’engendrer de nouveaux revenus pour l’église », soutient Bertrand Gagnon, précisant toutefois qu’il se garde un droit de regard quant à la nature des événements tenus dans le local.

Les récentes décisions du comité de la Fabrique ne font pas l’unanimité auprès de la communauté. Certains auraient aimé conserver le bâtiment religieux tel qu’il était. « On doit aller vers le changement, pense M. Gagnon, pour rendre dynamiques les églises et assurer leur survie. »

Le diocèse de Baie-Comeau, de son côté, n’a pas donné son autorisation pour les projets de la Fabrique St-Marc. « On ne savait pas que ça prenait leur autorisation. Mais, on a avisé l’équipe du diocèse lors d’une rencontre concernant la rentrée paroissiale alors qu’on devait faire part de nos activités. Ils n’ont rien dit », témoigne le président.

Plusieurs bénévoles de la Côte-Nord impliqués dans des organismes religieux suivent présentement une formation universitaire sur le leadership missionnaire. Bertrand Gagnon et Marjolaine Tremblay en font partie.

« Ça nous amène à repenser les actions que nous pouvons faire notamment au niveau de la pastorale. Ce qu’on veut, c’est aller vers les gens », conclut le couple.

Galerie photo

Partager cet article