Le projet ambitieux d’une école alternative

Par Renaud Cyr 7:00 AM - 7 février 2023
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Quelques écoles alternatives ont vu le jour au Québec, mais on en retrouve aucune à l’est de Québec pour le moment. Photo Facebook/École Rose-des-Vents

Un comité de parents du secteur ouest de la Haute-Côte-Nord a un projet ambitieux : mettre sur pied une école alternative publique de niveau primaire. Plus de 50 personnes ont manifesté leur intérêt pour qu’un tel projet voit le jour via un sondage en ligne, sous forme d’ajout d’un volet alternatif dans une école primaire existante.

Le succès éducatif des enfants, surtout en bas âge, a été mis à rude épreuve durant la mise en place des mesures sanitaires gouvernementales au début de la COVID-19. Entre fermetures d’écoles, enseignement à distance et mesures sanitaires, les élèves n’ont pas toujours bénéficié d’un cursus scolaire adéquat durant leurs dernières sessions.

« La situation a soulevé des questionnements par rapport à l’offre scolaire au niveau régulier, et une éventuelle offre pédagogique différente dans le secteur », explique Lilas Lamontagne, l’une des instigatrices du projet d’école alternative pour la Haute-Côte-Nord et résidente de Tadoussac.

Les écoles alternatives existantes dans la province voient le jour dans les secteurs adjacents aux grands centres urbains, et aucune n’existe à l’est de la ville de Québec pour l’instant. Le projet du comité d’École alternative HCN, à l’instar de regroupements semblables à Baie-St-Paul et Saguenay, est encore à ses balbutiements.

Rencontre avec le CSS

Dans l’optique de reconvertir un volet existant d’une école primaire du secteur ouest en volet alternatif, quelques parents sont allés à la rencontre du Centre de services scolaire (CSS) de l’Estuaire l’an dernier.

« Nous ne voulons pas qu’une école ferme pour qu’une autre rouvre. Nous voulons plutôt qu’une partie du cursus ait une base alternative, et nous voulons également contrer la dévitalisation et répondre au besoin des parents et des enfants du secteur », avance Lilas Lamontagne.

Toutefois, « depuis que le projet a été publicisé sur les médias sociaux au cours des dernières semaines, aucun échange n’a eu lieu entre le CSS ni aucune des directions d’école concernées au sujet des démarches en cours », explique Patricia Lavoie, régisseuse aux communications, pour le CSS de l’estuaire.

Réorganisation

« Ça débute toujours par un groupe de parents qui veulent s’impliquer dans la vie scolaire », explique Stéphane Robitaille, ex-directeur d’écoles alternatives de la Mauricie et maintenant consultant en éducation.

« C’est ce qui fait qu’une école devient florissante. C’est difficile pour les professeurs de développer un bon nombre d’activités sans l’aide d’autres adultes », conclut-il.

Si la mobilisation des parents démontre qu’il y a assez d’intérêt et de volonté, le CSS de l’Estuaire doit cependant s’assurer que son corps professoral est en accord avec la réorganisation de ses activités scolaires.

« Ce qu’on commence à constater, c’est que des enseignants du secteur ouest souhaitent pouvoir enseigner de cette manière-là », affirme Lilas Lamontagne.

Toutefois du côté du CSS de l’Estuaire, il ne semble pas avoir eu d’intérêt formel manifesté par le corps professoral pour le moment.

« Il est possible que des membres du personnel soient éventuellement intéressés, mais pour le moment, aucun d’entre eux ne s’est manifesté et il n’y a assurément pas de groupe d’enseignants qui ont démontré leur volonté d’être porteurs du dossier », tranche Patricia Lavoie.

Séances d’information

Pour y voir plus clair et sonder l’intérêt réel des parents du secteur, le projet d’école alternative HCN organisera des séances d’information du 10 au 13 mars prochain.

Stéphane Robitaille sera sur place, et présentera aux parents et potentiels futurs élèves, des vidéos explicatives et des données supplémentaires sur le fonctionnement des écoles alternatives avec des témoignages.

L’école de la mer aux Bergeronnes fut identifiée par Stéphane Robitaille comme un potentiel lieu prometteur, toutefois ce scénario requerrait une accréditation du ministère de l’Éducation et un important financement.

L’ouverture d’un volet à même l’école publique est envisagée pour le moment. « Il faut que le CSS voit que c’est viable en terme d’achalandage pour créer des groupes multiâges et remplir un volet d’une soixantaine d’élèves », espère Stéphane Robitaille.

« Considérant plusieurs éléments propres à notre réalité régionale, dont le bassin d’élèves potentiels, nous ne sommes pas convaincus de la viabilité d’une telle initiative à court terme sur notre territoire », laisse tomber Patricia Lavoie.

Stéphane Robitaille, ex-directeur d’écoles alternatives et maintenant consultant en éducation. Photo courtoisie

Un succes story mauricien

En 2004, l’école de la Tortue-des-Bois située à St-Mathieu-du-Parc près de Shawinigan devait fermer ses portes, faute d’élèves.

Un regroupement de parents appuyé par la municipalité a présenté un plan de projet de transformation d’école à la Commission scolaire de l’Énergie, et en 2005, l’école alternative de la Tortue-des-Bois ouvrait ses portes.

« Depuis 2005, au-dessus d’une trentaine de familles sont déménagés à St-Mathieu-du-Parc uniquement pour l’école, et il y en a encore qui viennent à chaque année », observe d’emblée Stéphane Robitaille.

« On entend souvent que les élèves d’écoles alternatives font ce qu’ils veulent, mais c’est un mythe », explique-t-il.

« L’école alternative offre un parcours différent et plus vivant que le parcours traditionnel, et met l’accent sur le rythme propre à chaque élève », conclut-il.

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