Billy-Jack Jourdain s’ennuyait de sa vie de famille qu’il avait construite avec son ex-conjointe de Manawan et leurs deux enfants. Le pompier de 23 ans espérait que les choses s’arrangent. Mais une journée après avoir obtenu son congé de l’hôpital de Port-Cartier, il s’est enlevé la vie. Quatre mois plus tard, son ex-conjointe a fait de même. Leurs enfants âgés de 5 et 6 ans aujourd’hui, sont orphelins. Est-ce que les choses auraient pu se passer autrement ? C’est une réponse que les proches n’auront probablement jamais.
« Pourquoi on ne m’a pas appelé ? Juste pour s’assurer qu’il n’était pas tout seul » lance sa mère, Nelida Jourdain, la voix nouée, avant de reprendre son souffle.
On ne l’a pas appelé lorsque son fils a quitté le Centre hospitalier de Port-Cartier, il y a un an, le 24 janvier, vers midi. Pourtant, elle s’y était présentée vers 23 h, la veille. Elle voulait le voir. Elle s’inquiétait. Son « bébé » avait des idées d’en finir avec la vie. Alertés par ses propos, des proches avaient appelé la police. Billy-Jack Jourdain a été trouvé inconscient dans son appartement et transporté à l’hôpital. À ce moment, sa vie n’était pas en danger.
Nelida Jourdain habite à Schefferville. Le hasard a voulu qu’elle soit de passage à Sept-Îles pour faire des achats, lorsque les événements sont survenus. Voyageant en train, elle n’avait pas de voiture, mais elle avait demandé à un ami de l’amener jusqu’à Port-Cartier.
Une fois sur place, on lui a refusé l’accès à son fils, sous prétexte qu’il dormait. On ne lui a pas donné davantage d’information. On n’a pas noté son numéro de téléphone. On ne l’a pas informé de la suite des choses.
« Moi, dans ma tête, je voulais le ramener avec moi pour pouvoir le surveiller », explique Mme Jourdain.
Démunie et à des centaines de kilomètres de chez elle, elle n’a eu d’autre choix que de rebrousser chemin.
« Je ne connaissais personne là-bas. Je ne savais pas où aller. Je ne pouvais pas demander à mon chauffeur de m’attendre », dit-elle.
Le 25 janvier, Billy-Jack Jourdain a décidé d’en finir dans le garde-robe de son appartement de Port-Cartier, une journée après avoir reçu son congé de l’hôpital.
C’était quelqu’un qui aidait toujours les gens autour de lui. Il était passionné par son métier de pompier. Après un cours à l’Académie des pompiers de Mirabel, il poursuivait sa formation auprès de la Sécurité incendie de la Ville de Sept-Îles. Dans le contexte de la pénurie de logements, le seul qu’il avait trouvé était à Port-Cartier.
Vers un nouveau départ
Deux jours avant son décès, il a parlé avec sa mère pour une dernière fois.
« Il voulait retrouver sa vie de famille », dit-elle.
Ça le rendait triste, certes, mais pas au point de penser une seconde qu’il irait jusqu’à poser un geste irréversible.
Elle lui avait suggéré de revenir à Schefferville, de prendre du temps pour lui, un nouveau départ. Elle lui a offert de payer pour faire embarquer ses effets personnels sur le train. Il avait accepté.
Mais quelques heures plus tard, ses propos ont pris une autre tournure. Ils sont devenus si inquiétants, que des proches ont contacté les policiers afin qu’ils se rendent chez lui. Ils l’ont retrouvé inconscient et l’ont transporté à l’hôpital. Il était autour de 21 h, le 23 janvier.
Le 24 janvier vers midi, il a reçu son congé. Il est parti du centre hospitalier seul, sans filet de sécurité. C’est ce que sa mère et ses proches n’arrivent pas à s’expliquer.
« Je pensais qu’il le garderait, ou qu’il l’enverrait en psychiatrie. Quand quelqu’un se rend à l’hôpital pour une tentative de suicide, c’est un appel à l’aide. On ne le laisse pas partir seul, même si on pense qu’il va bien », déplore Mme Jourdain, qui estime qu’il y a eu certaines négligences.
« Il aurait dû y avoir un filet de sécurité, ou on aurait dû m’avertir moi que mon fils n’allait pas bien mentalement. Peut-être que j’aurais pu faire quelque chose. On aurait pu éviter ça, c’est ce que je me dis. »
« Peut-être que j’aurais pu lui parler, le faire changer d’idée », poursuit-elle, en larmes. « C’est une question que je me pose tous les jours. »
Mme Jourdain a la garde de sa petite-fille, la plus jeune enfant de Billy-Jack Jourdain. L’autre enfant a quant à lui été confié à ses grands-parents maternels.
Plus de réponses à propos de la manière dont le cas de son fils a été géré pourraient peut-être apaiser un peu, dit Mme Jourdain.
« Mais je n’en guérirai jamais, ce sera toujours là, jusqu’à ce que je meurs moi aussi. C’est mon bébé, c’est mon fils.»
Informée de rien
Nelida Jourdain a appris la mort de son fils dans un appel Facetime avec sa fille.
« J’étais comme plus là. Je n’arrivais pas à y croire, car mon garçon, ce n’est pas un enfant suicidaire (…) je me disais qu’ils [les policiers] s’étaient peut-être trompés de personne. »
Elle n’était pas au courant qu’un coroner enquêtait sur les événements. Il ne l’a jamais contactée. Elle l’a appris en lisant un article sur le sujet dans nos pages, la semaine dernière. On lui avait cependant dit qu’il n’y aurait pas d’autopsie, puisqu’aucune trace de violence n’avait été trouvée.
Nelida Jourdain est allée dans l’appartement de son fils après son décès. Comme prévu, il avait commencé à emballer ses affaires. Il avait même fait une brassée de lavage.
« Ça n’avait pas l’air de l’appartement de quelqu’un qui voulait mourir.»
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Port-Cartier : il se suicide une journée après son congé de l’hôpital
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