Rivière-Saint-Jean : trois corps finalement sauvés de l’érosion 

Par Emelie Bernier 11:58 AM - 21 janvier 2025 Initiative de journalisme local
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Les conditions climatiques et les grandes marées ont mené à une importante érosion dans le secteur du « champ des Robin », ce qui rendait l'exhumation de plus en plus pressante. Photo courtoisie

Ce ne sont pas deux corps qui reposaient dans le champ des Robins, mais bien trois, comme on l’a découvert lors de l’exhumation réalisée le 12 janvier, pour éviter aux dépouilles d’être emportées par l’érosion. « Il était minuit moins une », raconte la mairesse de la municipalité, dont les derniers mois ont été rythmés par cette situation hors du commun. 

On connaissait avec certitude l’existence de deux sépultures, celles des dénommés Le Rossignol et Chambers. La possibilité qu’un autre défunt ait été enterré à cet endroit n’était pas écartée et le hasard a plutôt bien fait les choses, indique la mairesse Josée Brunet.

« En creusant, on est tombé un peu par hasard sur la troisième sépulture, qui n’avait pas de pierre tombale. Cette possibilité avait été envisagée et on avait décidé que la même procédure serait appliquée, donc on a également exhumé le 3e corps qui repose présentement dans les locaux de la Maison Mallet et fils, avec celui de M. Le Rossignol. »

Quant aux restes de M. Chambers, ils ont été enterrés le jour même de l’exhumation, au cimetière de Rivière Saint-Jean (voir autre texte).

Bien que le dossier des sépultures menacées par l’érosion dans le champ des Robins à Rivière-Saint-Jean ne date pas d’hier, la cadence s’est accélérée vitesse grand V depuis décembre.  

Le Commowealth War Graves, au courant de la situation et impliqué de par le statut de vétéran de M. Le Rossignol, avait eu recours à des spécialistes de l’UQAR pour définir un échéancier pour l’exhumation.

” L’information qu’ils avaient eue, c’est qu’ils avaient jusqu’en 2029 avant que l’érosion se rende au site “, explique la mairesse Josée Brunet.

Un contremaître des travaux publics de la municipalité visitait régulièrement les lieux, surtout depuis l’été dernier.

” Tout s’est accéléré et on a accentué les visites. On était à 30 pieds durant la période estivale, à 23, 12, 7 puis à 2 pieds ! Durant la période des Fêtes, on a maximisé les appels pour faire bouger les choses. On a eu une équipe du tonnerre ! “, lance la mairesse, qui a tenu le premier rôle dans ce qui s’apparentait à un feuilleton.

Elle insiste toutefois sur l’importance des nombreux rôles de soutien. 

Il y a les deux députées de la région qui ont fait pression, d’anciens vétérans qui ont servi de courroie de transmission et de traduction avec le Commonwealth War Graves, la firme d’avocat qui a permis d’obtenir un jugement pour aller de l’avant avec l’exhumation et de mettre la main sur les documents requis… et bien d’autres, car la liste de gens qui ont mis la main à la pâte est longue et capitale pour la mairesse de Rivière-Saint-Jean. ” Il manquait encore le document de la santé publique 20 minutes avant de passer devant le juge, mais on a complété le dossier juste à temps et le juge a rendu son verdict le 10 janvier vers 15 h 30. Dimanche à 8 h, on a commencé l’exhumation. Et en fin de journée, M. Chambers était enterré au cimetière de Rivière-Saint-Jean “, raconte, presque essoufflée, la mairesse.

Les ossements de MM Chambers et Le Rossignol ont été transférés dans des caisses de cèdre en prévision de leur inhumation. Photo courtoisie

Pas terminé

La maison Mallet et fils a été mandatée pour extirper les cercueils de terre. Ceux-ci étant complètement grugés par les éléments et le temps, les os ont été transférés dans des caisses en bois. La troisième dépouille a pour sa part été déposée dans un sac et transportée sur une civière, jusque dans les locaux des services funéraires.  Un coroner est impliqué dans ce dossier, puisqu’on ne connaît pas l’identité du défunt.

« Le dossier n’est pas clos. Les corps sont sauvés, mais pour la suite du troisième corps, on va découvrir chacune des étapes au fur et à mesure. Comment procéder au niveau légal ? Comment trouver qui est cette personne ? »

Josée Brunet n’aurait jamais pu imaginer gérer un tel dossier au cours de sa carrière politique.

« Ç’a été un apprentissage en mode accéléré ! Je pense que peu d’élus vivront ce genre d’épisode, mais la belle histoire dans tout ça, c’est le dévouement de chacun. Je lève mon chapeau à chacune des personnes qui m’a soutenue, ç’a été d’une fluidité exemplaire ! On était tous au même niveau et on a joué chacun notre rôle, sans compter les heures. C’est ce qui a permis un dénouement heureux. »

Heureux, mais chargé d’émotion, bien sûr.

On aperçoit ici la mairesse de Rivière-Saint-Jean, Josée Brunet, écrivant un mot d’adieu sur la boîte de cèdre dans laquelle les os de M. Le Rossignol ont été déposés en prévision de leur inhumation au cimetière de la municipalité. Photo courtoisie

« Lors de l’exhumation, la famille de M. Chambers était là. C’était touchant, parce qu’on réalisait le rêve de son père, qui avait toujours souhaité exhumer son aïeul. On a l’impression d’avoir fait quelque chose de bien et je pense qu’on va entretenir des liens serrés avec le Commonwealth War Graves pour la suite. » La mairesse de Rivière-Saint-Jean ne cache pas qu’elle aimerait rendre hommage aux défunts et créer un monument pour rappeler la saga des défunts du champ des Robins.

« On aimerait commémorer. On a beaucoup de vétérans dans notre municipalité et c’est dans les cartons de la municipalité, de faire un petit endroit pour les reconnaître. Il y aura place à cet endroit pour raconter ce qu’on a vécu dans les derniers mois… »