Tarifs: «Donald, c’est vraiment stupide ce que tu fais», dit Justin Trudeau

Par Michel Saba, La Presse Canadienne 3:19 PM - 4 mars 2025
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Le premier ministre Justin trudeau tient une conférence de presse à Ottawa sur les droits de douane imposés par les États-Unis, le mardi 4 mars 2025 LA PRESSE CANADIENNE/Adrian Wyld

Le premier ministre Justin Trudeau n’est pas passé par quatre chemins mardi, quelques heures après l’imposition par le président américain Donald Trump de tarifs sur les importations canadiennes.

«Donald, (…) c’est vraiment stupide ce que tu fais», a-t-il lancé au voisin américain, en reprenant les mots du Wall Street Journal, lors d’une conférence de presse dans le foyer de la Chambre des communes.

S’adressant «directement» aux Américains, il a expliqué que leur propre gouvernement a choisi de mettre leurs emplois à risque et de provoquer une hausse des prix, notamment sur des objets de tous les jours, comme «l’épicerie et l’essence», mais également sur des achats majeurs, comme ceux «des voitures ou des maisons».

Les marchés boursiers sont déjà en forte baisse et l’inflation devrait augmenter partout aux États-Unis, a noté le premier ministre.

Le Canada ne pliera pas, a-t-il déclaré, affirmant que des tarifs de 25 % sont imposés par le Canada sur quelque 30 milliards $ de produits américains dans l’immédiat et le seront sur 125 milliards $ d’autres produits des États-Unis dans 21 jours.

Parallèlement, son gouvernement verra quels ajustements peuvent être apportés à l’assurance-emploi pour faire face aux conséquences de ces droits de douane.

M. Trudeau discutera plus en profondeur des suites à donner à cette situation ce mardi après-midi avec ses homologues provinciaux.

Il a évité une question à savoir s’il envisage d’imposer des tarifs à l’exportation sur le pétrole, le gaz et la potasse, même si les premiers ministres provinciaux sont en désaccord.

Le premier ministre a néanmoins répété qu’il n’y aura pas une région ou une industrie qui «souffrira» plus que les autres dans la réponse canadienne, et qu’il sera «équitable». Le plus important, a-t-il dit, est que les Canadiens restent unis.

Se serrer les coudes

Le premier ministre a reconnu que les temps seront «difficiles» pour les Canadiens et leur a demandé de se «serrer les coudes» et de faire preuve de solidarité pour défendre leur pays.

«Lâchez pas, a-t-il dit. C’est le temps de redoubler d’efforts, de se tenir debout pour notre pays, de faire tout ce qu’on peut pour choisir le Canada, pour défendre le Canada.»

M. Trudeau a évoqué avoir vu les Canadiens partager des listes de produits pour appuyer les entreprises d’ici, changer leurs plans de vacances afin de rester au pays, ou d’encourager les petites entreprises.

En réponse à un journaliste, M. Trudeau s’est dit désormais convaincu que la guerre commerciale lancée par l’administration Trump n’a qu’un seul but: faire s’écrouler l’économie canadienne pour faciliter l’annexion du Canada.

Selon lui, il est clair que Donald Trump utilise la lutte contre le passage de fentanyl à la frontière comme «un prétexte» juridique pour justifier l’imposition les droits de douane.

Le Canada, a affirmé le premier ministre, a tout mis en œuvre pour contrer ces passages qui, au départ, représentent moins de 1 % des entrées aux États-Unis dans les deux cas.

M. Trudeau s’est également interrogé sur le fait que l’administration Trump lance cette guerre commerciale contre «son plus proche allié, son plus proche partenaire et son plus proche ami» alors qu’«au même moment, (le gouvernement américain) parle de travailler positivement avec la Russie et d’apaiser Vladimir Poutine, un dictateur, menteur et meurtrier».

Justin Trudeau a ajouté avoir discuté avec les alliés du Canada, notamment en Europe, et que ceux-ci «sont très conscients que, si les Américains sont prêts à agir ainsi avec son plus proche allié, tout le monde est à risque».

Programmes «ciblés»

Lors d’un point de presse, le chef conservateur Pierre Poilievre a insisté que «la quasi-totalité» des tarifs douaniers perçus par le Canada devraient servir à réduire les taxes et les impôts.

Le reste devrait être mis de côté pour aider les travailleurs les plus touchés par la guerre commerciale à travers des programmes «ciblés», évoquant simplement le programme existant d’assurance-emploi qui «doit être là».

M. Poilievre a détaillé les «grandes idées conservatrices» qu’il juge plus «essentielles» que jamais. Il répète notamment qu’Ottawa devrait rapidement donner le feu vert à la construction de pipelines, y compris GNL Québec. 

«Je le dis en français, fièrement: “Je suis pour les pipelines”, a-t-il déclaré. On va bâtir les pipelines ou bien les autres partis vont continuer de donner notre pétrole à un prix plus bas à Donald Trump.»

Le chef néo-démocrate Jagmeet Singh a pour sa part demandé au gouvernement Trudeau de rappeler le Parlement afin de gérer la situation.

M. Singh croit qu’il faut adopter dès maintenant des mesures pour protéger les travailleurs, et il s’engage à ne pas faire tomber le gouvernement minoritaire pendant cette période.

«Premièrement, on doit avoir des protections en place, a-t-il dit. Il n’y a aucune protection en ce moment pour les travailleurs qui va vraiment au niveau nécessaire pour la crise dans laquelle l’on se retrouve. (…) Et on aura une élection après ça.»

– Avec des informations de Pierre Saint-Arnaud et de Vicky Fragasso-Marquis

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