Les enseignants vivent plus de violence

Par Anne-Sophie Paquet-T. 6:50 AM - 8 avril 2025
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La FSE-CSQ évoque la violence et le manque de soutien comme des facteurs majeurs de détresse psychologique chez les enseignants. Istock

Deux semaines après la Semaine de prévention de la violence en milieu scolaire, on apprend que des enseignants de la Haute-Côte-Nord et de la Manicouagan vivraient à l’intérieur d’un climat de plus en plus difficile et violent.

La Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ) a lancé deux publicités radiophoniques visant à sensibiliser la population à la détresse vécue par les enseignants du Québec. Elles visaient à mettre en lumière des violences faites aux enseignants de tous les niveaux. 

Ces gestes, qui sont subis à l’intérieur des établissements et parfois jusqu’à l’extérieur, peuvent venir de partout incluant des parents d’élèves.

Qu’en est-il des enseignants du territoire couvert par le Centre de services scolaire de l’Estuaire (CSSE) ? Le journal Le Manic s’est penché sur cette question.

Des incivilités chaque jour 

« On a de la violence, et de plus en plus », affirme sans détour Rémi Therriault, président du Syndicat de l’enseignement de la Haute-Côte-Nord/CSQ. Selon lui, les cas d’agressions physiques, de menaces, de harcèlement verbal ou d’intimidation ne cessent d’augmenter. « C’est peut-être occasionnel pour certains, mais pour nous, c’est la pointe de l’iceberg », dit-il. « Ce qu’on entend, ce n’est qu’une fraction de ce qui est vécu. »

Un sondage mené par la Fédération des syndicats de l’enseignement (FSE-CSQ) en 2024 révèle que près de 50 % des enseignants subissent des incivilités au moins une fois par jour, et trois sur dix rapportent des situations conflictuelles avec des parents au moins une fois par mois.

Des enseignants à bout de souffle

Selon M. Therriault, la violence ne vient pas uniquement des élèves, mais aussi des parents. « Des enseignants reçoivent plusieurs courriels accusateurs par semaine, certains se font diffamer sur les réseaux sociaux, d’autres reçoivent carrément des menaces », dénonce-t-il. Il cite d’ailleurs un exemple troublant. « Il y a eu des cas où des parents ont menacé de frapper un enseignant. Ce sont des gestes graves, mais souvent banalisés. »

Outre les agressions, c’est le manque de soutien face aux élèves en difficulté qui épuise les enseignants, soutient le syndicaliste. « Ils se retrouvent seuls dans des classes avec des élèves qui demanderaient normalement un encadrement spécialisé », clame-t-il.

Un ton plus nuancé pour le CSSE

Interrogée à ce sujet, la directrice générale du CSSE, Nadine Desrosiers, reconnaît l’existence de cas de détresse, mais nuance l’ampleur du phénomène. « Oui, il y a des arrêts de travail, mais c’est souvent multifactoriel », explique-t-elle en citant quelques exemples tels que la fatigue, la vie personnelle difficile et des groupes d’élèves complexes.

Elle précise néanmoins que le taux d’absentéisme du personnel est inférieur à la moyenne provinciale depuis quelques années.

Pour répondre aux besoins grandissants de son personnel, le Centre de services scolaire de l’Estuaire a déployé plusieurs mesures concrètes dans les dernières années. « Nous travaillons avec un chercheur de l’Université Laval sur le bien-être au travail, nous avons une équipe multidisciplinaire étoffée et un programme d’aide aux employés qui comprend, entre autres, un accès à un médecin en ligne », explique la directrice générale.

Le CSSE s’est également doté de deux politiques claires, l’une datant de 2005​ et une version bonifiée adoptée en novembre 2024​. Ces politiques encadrent les situations d’incivilité, de violence et de harcèlement en plus de proposer des recours allant de la médiation à l’enquête formelle, avec des mesures disciplinaires possibles.

Par contre, sur le terrain, le défi reste la cohérence dans l’application. « Ce qui fait le plus mal, c’est quand rien ne se passe après un incident, déplore Rémi Therriault. Le soutien de la direction fait toute la différence dans la manière dont un enseignant va vivre un épisode de violence. »

Miser sur la prévention et la communication

Pour Mme Desrosiers, la prévention passe avant tout par une mobilisation collective. Le Centre de services scolaire travaille actuellement à définir un plan de formation ciblé, notamment pour les directions d’établissement, afin de mieux outiller les équipes à intervenir dans les cas de conflits, d’intimidation ou de violence. « Ce n’est pas juste un mot, la tolérance zéro, il faut qu’on pose des actions », insiste-t-elle.

La communication est au cœur de toute solution durable, selon la directrice générale. « La base, c’est de s’écouter », explique-t-elle, et ce, pour toutes les situations, même les plus conflictuelles. 

Elle est convaincue que des relations mieux encadrées et une culture de dialogue peuvent éviter bien des débordements. « Quand les communications sont claires, ça vient jouer sur les facteurs psychosociaux. »

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La France Yvon
La France Yvon
11 jours il y a

J ai enseigné pendant 25 ans pour la commission scolaire de l Estuaire et le plus important pour l enseignant c est d être épaulé par la direction et l équipe école.