Même avec des périodes d’attente interminable pour obtenir une place et des imprévisibilités soutenues engendrées par les grèves en CPE, plusieurs familles de la Côte-Nord continuent de soutenir la cause des éducatrices.
Karina Poulin, une infirmière clinicienne qui réside à Sept-Îles, a attendu deux ans avant d’obtenir une place en CPE pour son fils. Après la fin de son congé de maternité, elle et son conjoint ont dû faire preuve de créativité pour soutenir leur famille, notamment en employant des horaires de travail inversés.
« Comme ça, il y avait tout le temps l’un de nous deux qui était à la maison, mais on ne se voyait jamais », raconte-t-elle.
Comme leurs emplois les obligent à travailler une fin de semaine sur deux, le couple confiait leur enfant à de la famille, à Rivière-au-Tonnerre, afin de pouvoir passer la fin de semaine suivante en famille.
Quand l’appel du CPE est enfin venu, ce fut un immense soulagement. Mais peu après, la grève des éducatrices a ramené l’incertitude.
Pourtant, malgré un désir de stabilité et de prévisibilité, Karina Poulin reste, comme plusieurs parents, 100 % solidaire avec la cause.
« Elles sont quand même très rares les éducatrices, parce qu’elles n’ont pas des conditions super faciles. En même temps, on en a besoin, nous », dit-elle. « Ce serait le temps que les instances donnent aux éducatrices ce qu’elles demandent et ce qu’elles méritent. »
Un passage obligé
Pour Catherine Drouin, une enseignante au primaire de Matamek, le constat est le même. Si elle a peiné à trouver une place sur la liste des 0 à 5 ans en CPE, et qu’elle reconnaît maintenant sa chance, les inconvénients d’une grève demeurent pour elle un « passage obligé ».
« C’est sûr que ça nous demande de s’ajuster avec nos engagements et avec notre emploi », dit-elle. « Mais s’il faut que je prenne des journées de congé pour qu’on puisse avoir des services de garde de qualité, ce n’est pas ça qui me dérange en soi », conclut-elle.
Avec son regard d’enseignante, elle insiste sur l’importance d’intervenir tôt dans le développement des enfants.
« Si on a amélioré les conditions dans le milieu scolaire, si les éducatrices au scolaire sont mieux payées qu’en CPE, moi je ne comprends pas pourquoi les 0 à 5 ans seraient moins importants que les 5 ans et plus », déplore-t-elle. « Je pense que c’est une question de valorisation. »
Bris de services
François Marceau, éducateur à la petite enfance et président du Syndicat des travailleuses et travailleurs de CPE de Sept-Îles, comprend les parents préoccupés par les grèves. Mais, il souligne que, sans progrès aux tables de négociation, le réseau et les familles risquent de souffrir davantage.
« [Au CPE Sous le bon toit], depuis le printemps dernier, on a perdu sept éducateurs. Maintenant, depuis janvier, on a eu trois démissions », indique-t-il. « C’est énorme ! »
Et les éducateurs ne sont pas les seuls touchés. François Marceau remarque que le personnel de cuisine quitte aussi les CPE, pour trouver de meilleures offres ailleurs.
La difficulté de rétention de personnel, aggravée sur la Côte-Nord en raison de possibilités d’emploi plus alléchantes ailleurs, fait craindre le pire.
« À un certain point, si on ne fait pas la grève et qu’on ne trouve pas une parité de nos conditions de travail avec celles du secteur de l’éducation, au secteur public, les parents vont faire face à des bris de service », avertit-il. « Si on réussit à avoir gain de cause avec la grève, ça va déjà nous aider à garder notre personnel et à inciter les jeunes à venir travailler. »
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