Une vie, ça n’a pas de prix et pourtant, on en gaspille des centaines à chaque année sur les routes du Québec. Le bilan routier fait état de 379 décès en 2024, dont 12 sur les routes de la Côte-Nord. Par rapport à 2023, le nombre de décès dus à des accidents routiers est en hausse de 50 % chez nous. Il est passé de 8 à 12.
Pour tout dire, il s’agit de 12 décès de trop !
Et que dire des autres statistiques dévoilées par la Société de l’assurance automobile du Québec (SAAQ) la semaine dernière. Pas moins de 38 personnes ont subi des blessures graves en s’aventurant sur nos routes en 2024. C’est 17 de plus que l’année précédente. De telles hausses doivent nous ouvrir les yeux. Elles nous forcent à conclure que le bilan routier de la Côte-Nord est loin d’être reluisant, même si le nombre de blessés légers a diminué de 345 à 324 (- 13,3 %).
Quelles en sont les causes ? Un porte-parole de la SAAQ soutient que « les comportements humains sont toujours majoritairement à l’origine des incidents routiers dans (notre région), particulièrement la vitesse au volant ». Il semble même que la vitesse soit en cause dans un accident mortel sur trois chez nous. Donc, on peut en déduire que quatre personnes ont perdu la vie l’an dernier en raison de la vitesse. Mais les huit autres sont mortes à cause de quoi ?
Les statistiques ne nous fournissent pas de réponses à ce sujet. On peut toutefois tirer nos propres conclusions en constatant que les principales causes de collisions mortelles au Québec sont la conduite imprudente et les excès de vitesse (31 %), les capacités affaiblies par l’alcool, la drogue et la fatigue (15 %) et l’inattention ou la distraction (9 %). Le portrait demeure assez stable malgré toutes les campagnes de sensibilisation menées par la SAAQ ainsi que par les autres acteurs du domaine de la sécurité routière. Les comportements humains évoluent lentement, mais si on remonte à 40 ou 50 ans en arrière, on constate de nets progrès.
En effet, à une certaine époque, on ne se souciait guère de prendre le volant après avoir consommé de l’alcool. C’était toléré. Le contexte était nettement différent : il y avait beaucoup moins de voitures sur les routes. Aujourd’hui, le parc automobile continue d’augmenter de manière exponentielle tant au Canada qu’au Québec. Dans la Belle Province, le nombre de véhicules en circulation a augmenté de près de trois millions en deux décennies, passant de 4 660 947 en 2000 à 7 058 605 en 2022. De cet ensemble, le nombre d’automobiles et de camions légers a connu une hausse fulgurante de plus de 1,5 million durant cette période.
En 2022, le parc automobile québécois comptait donc 4 993 645 de voitures automobiles et de camions légers. C’est tout un casse-tête pour les préventionnistes. La SAAQ tablait sur les publicités chocs pour sensibiliser les conducteurs, maintenant elle mise sur l’humour, mais en bout de ligne, il y a encore des gens qui meurent en prenant le volant et d’autres qui sont blessées gravement et dont l’existence risque d’être handicapée. Derrière chaque accident mortel se cache un drame humain et, pour l’éviter, il faut réagir.
Les législateurs en ont le devoir. Dernièrement, un sondage Léger, commandé par l’Association pour la santé publique du Québec (ASPQ), a démontré clairement que la population est favorable à une réduction du taux d’alcool de 0,08 à 0,05 ainsi qu’à l’application de mesures administratives plus sévères comme le retrait immédiat du permis de conduire et la saisie de la voiture automobile. On parle de 61 % des personnes sondées. La SAAQ est favorable à ce changement, de même que plusieurs coroners, mais le gouvernement du Québec résiste encore. La CAQ s’y objecte, mais elle n’aura pas d’autre choix logique que de suivre le courant.
Au Canada, on a longtemps résisté au dépistage obligatoire de l’alcoolémie, mais depuis le 18 décembre 2018, c’est devenu une loi. Les difficultés (la fiabilité des appareils de détection) ont été surmontées. Le taux d’alcool reste à réviser. Pourquoi 0,08 au lieu de 0,05 comme espéré ? Il y a toutes sortes de considérations qu’on lance dans la discussion, comme le poids, le sexe et l’âge, mais reste un fait indéniable : « Une vie n’a pas de prix ».
On dit que l’abaissement du taux d’alcool permettrait de sauver neuf vies par année au Québec. Certains des opposants y voient de « l’intimidation morale », mais le commun des mortels, avec son gros bon sens, croit que c’est l’une des avenues à privilégier pour éviter de plonger des familles dans le deuil et créer des orphelins. La majorité des collisions mortelles sont évitables. Qu’attendons-nous pour le prouver ?
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