Les télévisions communautaires ont la vie dure

Par Renaud Cyr 4:45 PM - 16 novembre 2022
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La télévision communautaire est l’un des derniers endroits où il y a des nouvelles entièrement locales. Photo NousTV

Les télévisions communautaires font face à un financement irrégulier, vaguement encadré par la loi. Pourtant, elles sont trop souvent la seule vitrine qui confirme la vitalité des petites communautés.

En marge de son 24e congrès tenu en octobre, la Fédération des télévisions communautaires autonomes du Québec (FTCA) s’est exprimée en séance du comité sénatorial à propos du projet de loi fédéral C-11 et la modification de la Loi sur la radiodiffusion.

La FTCA, fondée en 1998, se mobilise pour défendre l’intérêt de ses 41 membres tant au niveau provincial que fédéral. Elle multiplie les représentations auprès des différents ministères et paliers de gouvernement dans les dossiers de financement, de publicité et de protection du canal communautaire par le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).

En septembre, la directrice générale de la FTCA, Amélie Hinse, a pris la parole pour définir l’élément communautaire dans la Loi sur la radiodiffusion.

« Pour nous, être reconnu dans cette loi permet ensuite de s’insérer dans la législation qui suivra. Si on ne fait pas partie de tout cela, nous n’aurons pas droit à ce financement qui viendra directement des plate formes qui gagnent l’argent que les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) gagnaient avant, grâce à la publicité à la télévision », peut-on lire dans le résumé de la rencontre.

« Nous voulions inclure des mentions de la télévision communautaire dans la loi pour que l’on soit reconnu en tant qu’un secteur important de la télédiffusion », explique-t-elle.

Crise des médias

Selon le Digital News Report 2022 de l’institut Reuters, la confiance de la population canadienne envers les médias d’information est en baisse constante depuis 2016 (de 55 % des répondants à 42 %).

Les répondants affirmant que les médias sont libres d’ingérence politique et économique sont également en baisse par rapport à 2017.

Bien qu’elles disposent de moyens réduits par rapport aux grands câblodistributeurs, les télévisions communautaires ont un contact privilégié avec la population.

« La télévision communautaire est un des derniers endroits où il y a des nouvelles entièrement locales. Les gros joueurs ont tous déserté les petits marchés locaux et régionaux », précise Amélie Hinse.

« Nous participons à lutte contre les fausses nouvelles, car nous sommes présents sur le terrain et nous entretenons des liens avec les communautés », ajoute-t-elle.

Rendez-vous manqué avec la main-d’œuvre

Comme dans la plupart des sphères professionnelles dans la province, le bassin de travailleurs se qualifiant pour travailler dans les stations de télévisions communautaires reste restreint.

« Malgré l’existence de l’initiative de journalisme local pour les communautés mal desservies en nouvelles, trois de nos membres n’arrivent pas à trouver de journalistes même s’ils ont les subventions », décrit la directrice de la FTCA.

Même son de cloche du côté de Cogeco à Baie-Comeau et Sept-Îles. « De façon générale en production télé, on s’arrache les talents. Pendant la COVID-19, beaucoup de gens ont quitté et beaucoup ont pris leur retraite. C’est difficile d’assurer leur remplacement », dévoile Patrick Delobel.

Moyens limités

Sans pouvoir fournir quatre heures de contenu télévisuel original par semaine, l’obtention de subventions est plus ardue auprès du ministère de la Culture et des Communications (MCC). Entre un manque d’employés pour produire des heures minimales de contenu, un bingo peu rentable et des subventions revues à la baisse, difficile de trouver l’équilibre.

« Mon budget me permet d’avoir deux personnes aux deux endroits avec des bénévoles. Ça a toujours été compliqué, mais durant les dernières années c’est de plus en plus difficile », renchérit M. Delobel.

« C’est toujours une histoire de survie. C’est également une question de quantité et de qualité du contenu, qui est de plus en plus difficile de faire comparativement à avant », explique Mme Hinse.

« La télévision est un médium très technique qui nécessite beaucoup de personnel, qui est de moins en moins évident à mobiliser », conclut-elle.

Pour la directrice générale de TVR7, Lyna Fortin, le financement du MCC offert aux télévisions communautaires n’est pas assez généreux.

« Le ministère de la culture ne comprend pas qu’un journal ou une radio communautaire coûte beaucoup moins cher à opérer qu’une télévision communautaire. Et ce sont les télévisions communautaires qui reçoivent le moins de financement », déplore-t-elle.

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