Collier de perles de verre à Tadoussac : une vedette locale dans un futur projet postdoctoral

Par Renaud Cyr 11:59 AM - 1 février 2023
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Le poste de traite Chauvin, où est conservé le collier de perles de verre. Photo Société des musées du Québec

Le docteur en archéologue et chercheur Vincent Delmas prépare un projet postdoctoral sur l’étude des perles de verre datant de la Nouvelle-France, et un artéfact de Tadoussac y sera étudié. Il s’agit d’un collier retrouvé par hasard par un particulier il y a près de 40 ans sur un terrain près de la cale sèche, maintenant conservé au poste de traite Chauvin.

Vincent Delmas a dédié la majeure partie de sa carrière de chercheur aux pêcheurs basques présents dans sur le fleuve Saint-Laurent du 15e au 18e siècle, en plus de faire l’étude subaquatique d’épaves de bateaux jonchant le fond du fleuve.

Son prochain projet : étudier les perles de verre montées en collier sous le régime français, qui avaient des fins commerciales et religieuses.

« J’avais commencé à intégrer des objets de Tadoussac et de la Côte-Nord dans Archéolab, un répertoire d’objets du patrimoine culturel du Québec, et c’est avec cela j’ai découvert les perles de verre », raconte-t-il.

Collier reconstitué

Le collier reconstitué a une histoire bien particulière. Les perles qui le composent ont été trouvées par Mme Julienne Tremblay Ratté qui jardinait sur son terrain.

Son terrain situé près de la cale sèche correspond à l’emplacement où a été érigée en 1646 la première chapelle en pierre de Tadoussac et l’une des premières en Amérique du Nord, qui fut malheureusement ravagée par les flammes entre 1665 et 1670.

Il y avait sur le terrain de la chapelle un cimetière amérindien, et les perles qui y ont été trouvées n’ont pas toutes été datées.

Selon un rapport sur l’analyse chimique de 5 perles de verre effectué par Nadia Charest et Caroline Jackson de l’université de Sheffield, les perles dateraient de régime français tardif et du début du régime britannique.

Le lot de perles de verre, ainsi que d’autres objets trouvés lors de l’excavation précédant la construction de l’hôtel Tadoussac, est exposé dans le musée construit en 1942 sur l’emplacement approximatif de la première maison française en Amérique du Nord.

Une perle de verre semblable à celles que constituent le collier reconstitué se trouvant au poste de traite Chauvin. Photo Julie Toupin

Voir plus clair

Si le financement est au rendez-vous, le projet postdoctoral de Vincent Delmas démarrera au mois du mai. Il avait fait parvenir une demande d’aide financière au conseil municipal, lue lors de la réunion du 10 janvier dernier.

Le conseil municipal avait décidé de ne pas accorder l’aide financière d’une valeur de 5 000 $, mais s’était toutefois montré ouvert à laisser le collier de perles de verre à la disposition du chercheur.

« Je comprends qu’une petite municipalité comme Tadoussac n’ait pas les moyens de financer un tel projet. La pandémie de Covid-19 a été difficile, et il n’y a aucun mal », indique Vincent Delmas.

« Le ministère de la Culture et la ville de Montréal se sont toutefois montrés très intéressés par le projet », précise l’archéologue. Les perles de verre étudiées dans le cadre de ce projet proviennent de collections de la ville de Montréal, de Québec, de Chicoutimi, et le spécimen du musée Chauvin.

Parcelles de Nouvelle-France

Le but sera de les dater en comparant les spécimens avec l’archéométrie, un procédé à la fine pointe de la technologie pour identifier la composition chimique et physique des objets anciens.

« Ce projet nous permettrait de voir à travers les perles de verre s’il existait un artisanat local, et de mettre des dates plus précises sur le développement de l’histoire du Québec », précise le chercheur. « C’est toujours intéressant pour les municipalités d’avoir les dates de leurs artéfacts », conclut-il.

Pour Vincent Delmas, le collier de Tadoussac est « unique comme spécimen », et son étude serait un « un double intérêt, car ça permettrait à la municipalité de confirmer certaines dates et de notre côté de faire avancer la recherche sur l’importance des perles de verre », explique-t-il.

« C’est ce qui fait la différence du Québec avec le reste de l’Amérique. Les gens pensent souvent qu’il n’y avait rien ici, alors que l’histoire de la Nouvelle-France et du Québec est très riche », fait savoir le chercheur.

Historique

Les perles de verre sont importées en Amérique du Nord par les Européens et servent surtout aux échanges avec les autochtones. Ceux-ci les utilisent comme monnaie d’échange et comme parure pour la confection de bijoux, de vêtements (broderie) et de ceintures.

En plus de ces usages, les Européens s’en servent pour la dévotion (chapelets) et la décoration des intérieurs (guirlandes, chandeliers). « On pense qu’à l’époque de la Nouvelle-France, il y avait des artisans à Québec qui fabriquaient des perles », indique Vincent Delmas.

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