Échange interculturel Pessamit-Montréal : pas besoin de Wi-Fi pour connecter

Par Johannie Gaudreault 12:00 PM - 27 juin 2023
Temps de lecture :

Les participants ont pu échanger autour de repas traditionnels innus. Photo Cégep de Baie-Comeau

Des étudiants de Pessamit et Montréal n’ont pas eu besoin de Wi-Fi pour connecter et tisser des liens d’amitié. Au contraire, leur échange interculturel a été bonifié par l’absence de réseau cellulaire en plein cœur du territoire du Nitassinan.

« On avait des téléphones, mais ils ne servaient à rien à part prendre des photos et mettre de la musique. On se regardait face-à-face et on se jasait de tout et de n’importe quoi. Ç’a permis de développer un lien extrêmement rapidement », raconte Hugo Picard Copeau, un des deux étudiants de Pessamit qui a participé à l’échange interculturel organisé par le Cégep de Baie-Comeau et le collège Maisonneuve. 

« On n’avait pas de cellulaire, aucun réseau, ça été une des meilleures choses qui nous est arrivé, pour moi. On a eu beaucoup de conversations très profondes entre nous. Parfois, on parlait jusqu’à 2 h du matin », renchérit la seconde élève innue, Macy Riverin, pour qui ce séjour a été marquant du début à la fin. 

Du 28 mai au 2 juin, 13 élèves montréalais ont été accueillis au camp Kanapeut au nord de Labrieville. L’objectif : leur faire découvrir la culture innue sous tous ses angles par une immersion totale et complète. 

« C’est l’enseignante du collège Maisonneuve qui m’a approchée pour organiser ce projet à l’hiver dernier. Elle voulait organiser un stage sur la Côte-Nord dans le cadre de son cours sur les enjeux autochtones », mentionne l’aide pédagogique individuelle au Tremplin DEC — Premières Nations au Cégep de Baie-Comeau, Camille Robidoux-Daigneault. 

Un premier volet a d’abord été lancé, soit les correspondances écrites entre les groupes des deux collèges dans leurs cours de sciences politiques (Montréal) et de philosophie (Baie-Comeau).

Il s’agissait d’une prémisse au séjour en territoire ancestral qui a conclu l’échange interculturel de belle façon tant pour les enseignants que les étudiants. 

Au terme de ces échanges, les participants se sont finalement rencontrés. « Il y a eu tout de suite une complicité incroyable entre les étudiants. C’est comme s’ils se connaissaient depuis toujours », révèle Mme Robidoux-Daigneault, qui a accompagné le groupe. 

« C’était stressant un peu au début parce que tu ne connais pas les personnes. Quand on est arrivé au camp, c’est comme si on se connaissait déjà. On est devenus amis en un claquement de doigts », raconte Macy Riverin.

« Au départ, c’était des inconnus et ce sont devenus de très bons amis. J’essaye de me trouver un lift jusqu’à Montréal pour aller les retrouver », confirme son acolyte. 

Des activités culturelles

Les Montréalais ont été plongés dans la culture innue tout au long du séjour.

« On a fait de la trappe aux castors, on a entendu un aîné jouer du tambour innu pendant qu’on apprenait les pas de danse qui l’accompagnait, une aînée de Uashat est venue nous raconter plusieurs légendes et enseignements, les jeunes ont fait une tente de sudation aussi, on a eu un festin où on a dégusté du caribou, de l’orignal et du castor », raconte l’aide pédagogique individuelle. 

La sensibilisation à la protection du territoire faisait aussi partie des enseignements. « C’est un territoire qui est en plein cœur des coupes forestières en plus de la situation des feux de forêt. C’était une prise de conscience qui était assez percutante autant pour nos étudiants innus, nos étudiants de Montréal que moi personnellement », affirme Camille Robidoux-Daigneault. 

Pour Macy Riverin, cet aspect a été « fâchant ». « J’ai appris de nouvelles choses sur le territoire ancestral comme la coupe forestière qui était bien cachée. C’est assez fâchant parce que c’est derrière les montagnes, là où tu ne vois pas », se désole-t-elle. 

Finalement, les visiteurs ont pu découvrir la communauté de Pessamit avec leur guide ainsi que quelques attraits locaux incontournables.

« C’était valorisant pour nos étudiants de Pessamit d’être en posture d’expert. Ils nous donnaient des cours d’innu et nous racontaient plusieurs enseignements qu’ils avaient reçus », ajoute Mme Robidoux-Daigneault. 

À refaire 

Les retombées positives du projet ont convaincu les deux établissements scolaires de reconduire l’échange interculturel l’automne prochain.

Cette fois, ce sera les élèves du programme baie-comois qui se rendront à Montréal pendant quatre jours. À l’hiver, le territoire ancestral accueillera à nouveau les élèves du centre urbain. 

La cohorte du Tremplin DEC — Premières Nations sera rehaussée à 5 étudiants. Le nouveau programme a débuté à l’hiver 2022. Il permet aux Innus de terminer leurs études secondaires tout en mettant les pieds au niveau collégial. 

Pour les deux participants de l’échange interculturel, les études se poursuivent. Macy débutera sa troisième session du programme cet automne tandis que Hugo commencera un DEC en Sciences humaines au Cégep de Limoilou. 

Le groupe était composé de 13 étudiants de Montréal et 2 de Pessamit. Photo Cégep de Baie-Comeau