Des propos « aberrants » du ministre Drainville sur les classes de maternelle

Par Johannie Gaudreault 12:00 PM - 25 août 2023
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Sindy Lebrun a déjà été enseignante au préscolaire. Photo courtoisie

Le ministre de l’Éducation Bernard Drainville a fait sourciller la vice-présidente du Syndicat de l’enseignement de la Haute-Côte-Nord, Sindy Lebrun, quand il a mentionné au micro de Paul Arcand le 17 août, que les classes de maternelle étaient « moins exigeantes ». 

Il a confié à la radio qu’il souhaite que les jeunes enseignants de niveau primaire se voient confier en priorité les groupes de maternelle 4 ans ou 5 ans puisqu’elles sont plus faciles à enseigner. 

Mme Lebrun ne se surprend toutefois plus d’entendre « des inepties » de la bouche du ministre. «  Le ministre de l’Éducation dit une chose et son contraire la semaine suivante. Il ne connaît rien au monde de l’éducation, particulièrement aux particularités du préscolaire », soutient-elle. 

Malgré tout, elle demeure en désaccord avec ces propos « empreints de préjugés » qui contribuent à renforcer l’idée que le secteur de l’éducation préscolaire n’est pas aussi important que les autres (primaire, secondaire, FP, FGA, collégial et universitaire), selon elle.

« De suggérer qu’enseigner au préscolaire est moins exigeant démontre une méconnaissance totale de ce qui se passe actuellement dans ces classes et de ce qu’on y enseigne », précise Mme Lebrun, qui a déjà été enseignante d’une classe de maternelle. « C’est aberrant et cela démontre, une fois de plus, son incompétence pour ce poste », ajoute-t-elle.

Des défis de taille

Les défis d’une classe de préscolaire sont nombreux. La charge de travail y est aussi importante qu’ailleurs, bien que différente sur certains aspects.

Au préscolaire, les enseignantes sont en présence des élèves plus longtemps dans la journée que dans les autres secteurs d’enseignement. Elles disposent de moins de périodes de spécialités pendant les heures de classe pour préparer leur matériel et planifier.

« Un des défis au préscolaire réside dans le fait d’avoir constamment le souci de prévoir des activités éducatives variées qui permettront aux élèves de développer individuellement les compétences et savoirs essentiels propres au programme de formation ministériel de l’éducation au préscolaire », de faire savoir la vice-présidente syndicale. 

C’est loin d’être simple. Ce mandat demande beaucoup de préparation, de travail créatif et de fabrication de matériel. « Une classe de maternelle, ce n’est pas statique. L’organisation physique de la classe et les coins, jeux, ateliers changent au moins une dizaine de fois dans l’année », souligne Sindy Lebrun.

Pour enseigner au préscolaire, rapporte Mme Lebrun, il faut littéralement avoir des yeux tout le tour de la tête et être prête à intervenir en tout temps. « Ici, c’est la simultanéité et la diversité des interventions qui rendent les journées aussi exigeantes qu’ailleurs. »

Sindy Lebrun témoigne des confidences obtenues de ses collègues enseignantes du primaire. « Elles trouvent ça difficile lorsqu’elles sont appelées pour faire de la suppléance dépannage dans les classes du préscolaire parce que c’est intense. Ça dit tout, non ? »

Par rapport à l’évaluation, il n’y a certes pas d’examens, mais cela ne rend pas la tâche plus facile. « Au contraire, il faut développer des outils d’observation pour consigner, en cours de journée, où est rendu chaque élève dans son développement », explique la syndicaliste. 

Une classe du préscolaire, c’est loin d’être reposant. Les enseignantes qui s’y trouvent le font par choix. « Celles qui s’attendent à ce que ce soit facile ne restent pas au préscolaire », conclut Mme Lebrun qui souhaite que le ministre « arrête de parler à tort et à travers de réalités qu’il ne connaît pas ».

« Les enseignantes du préscolaire méritent d’être reconnues à leur juste valeur donc oui, il serait apprécié qu’il réajuste son discours », clame-t-elle.

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