Le tiers des professionnels de l’éducation songent à quitter leur emploi

Par Johannie Gaudreault 10:36 AM - 15 mars 2021
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Renée Dufour est la porte-parole du Syndicat des professionnelles et professionnels de la Haute Côte-Nord.

Comme au niveau national, le tiers des professionnels de l’éducation du Centre de services scolaire de l’Estuaire songe à quitter leur emploi en raison de la lourdeur de la tâche et du manque de reconnaissance, selon le sondage réalisé par la Fédération des professionnelles et professionnels de l’éducation du Québec (FPPE-CSQ).

« Malheureusement, la situation en Haute-Côte-Nord n’est pas différente de ce qui se vit au Québec. C’est énorme et très inquiétant », a lancé Renée Dufour, porte-parole du Syndicat des professionnelles et professionnels de la Haute-Côte-Nord (SPPHCN-CSQ), en conférence de presse le 15 mars.

Le Centre de services scolaire de l’Estuaire compte 21 écoles primaires, 5 écoles secondaires, 3 centres de formation professionnelle et 3 centres de formation générale aux adultes dispersés sur un territoire de 350 km. « C’est évident qu’il y a trop d’écoles à couvrir avec les ressources sur lesquelles nous pouvons compter », a affirmé Mme Dufour.

Autre statistique inquiétante : 89 % des répondants au sondage déplorent pouvoir intervenir qu’auprès des élèves dont le cas est jugé urgent. « Ils n’ont pas le temps nécessaire pour assurer un suivi auprès des autres élèves, a dévoilé la porte-parole. Je n’ose imaginer la situation si nous assistions à des départs de collègues comme en fait l’état les réponses au sondage. »

Parmi les répondants, 70 % considèrent qu’il est impossible de faire les suivis requis ainsi que de la prévention. « Le personnel professionnel va au plus urgent. Il éteint des feux. Il n’a pratiquement plus le temps de faire le suivi des élèves en difficulté », a soutenu Renée Dufour, déplorant que cette situation dure depuis des années.

« À tel point que nous avons de sérieux problèmes d’attraction et de rétention du personnel professionnel. Plusieurs postes devenus vacants ne sont pas remplacés et il n’y a pas suffisamment de ressources pour faire de la prévention », a-t-elle poursuivi.

Inquiétudes

Psychologue en milieu scolaire depuis une vingtaine d’années, Caroline Beaudin a partagé ses inquiétudes. « Au cours des 10 dernières années, j’ai pu voir la hausse des consultations et de situations de crise, a-t-elle mentionné. Imaginez en contexte de pandémie, les besoins sont encore plus criants. Cette hausse demande de la disponibilité et du temps. Une complexité des diagnostics s’est ajoutée aussi. »

Selon Mme Beaudin, il s’est créé une augmentation de la charge de travail en raison « des multiples écoles assignées, un territoire étendu, et donc la hausse des besoins ». Cette situation fait en sorte que le secteur privé devient très attrayant puisqu’il permet « un meilleur contrôle au niveau de la charge de travail, une meilleure rémunération et le choix ou non d’accepter la lourdeur de certains dossiers ».

Le nombre de psychologues qui quitte le scolaire est devenu beaucoup plus qu’inquiétant pour Caroline Beaudin. « Au cours des deux dernières années, le fait que les psychologues ne sont pas remplacés crée l’absence de services dans une dizaine d’écoles primaires et dans deux écoles secondaires. Quant au privé, ce n’est pas la majorité des parents qui peuvent s’offrir ces services très coûteux », a-t-elle souligné.

La psychologue au secondaire se sent déchirée quotidiennement par cette réalité. Elle doit « faire des choix, mettre des jeunes en attente de service et répondre aux besoins d’urgence ». « Cela a un impact réel sur mes jeunes et leurs parents », a-t-elle admis.

Le sondage a été mené en février auprès des 10 000 professionnels membres de la FPPE-CSQ. Près du tiers d’entre eux, soit 3 060 personnes, ont répondu à l’enquête.

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