Pierre Rambaud et Gianna Bella : 50 ans de vie aux Bergeronnes

Par Renaud Cyr 12:00 PM - 30 août 2023
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Pierre Rambaud et Gianna Bella, fiers Bergeronnais depuis 50 ans.

Pierre Rambaud et Gianna Bella posent en 1973 les pieds aux Bergeronnes avec l’intention d’en profiter le temps d’une fin de semaine. Le jeune couple, alors dans la vingtaine, était loin de se douter qu’il finirait par y passer sa vie et marquer l’histoire de son village adoptif.

C’est lors d’une soirée mêlant le jazz et la messe que Pierre et Gianna se rencontrent pour la première fois en 1965 à Lyon en France.

Pierre Rambaud, un natif de Lyon, étudiait à l’époque en lettres alors que Gianna Bella travaillait comme auxiliaire en puériculture, l’ancêtre de l’aide-soignante auprès des enfants.

Bien que le début de l’histoire laisse penser à une rencontre coup de foudre qui se termine avec une vie heureuse et beaucoup d’enfants, la réalité fut quelque peu différente.

Ce qui fera dire à Gianna : « nous ne sortions pas ensemble ». Du moins, pas encore. « Disons qu’il était intéressant. On a eu une affinité naturelle », se remémore Gianna.

Pierre part pour la capitale française étudier en journalisme, et Gianna reste à Lyon. Les événements de mai 1968 avec ses émeutes étudiantes précipiteront l’arrivée au Québec de Pierre Rambaud.

Un Québec en pleine ébullition

C’est d’abord le 16 août 1968 que l’homme de lettres débarque au Québec.

À l’époque, le Québec vit à sa façon son mai 1968 avec la mobilisation étudiante dans les nouveaux cégeps à la suite d’une révolution tranquille qui déménage.

Habitant le carré Saint-Louis à Montréal, M. Rambaud côtoie de grandes figures des cercles militants de l’époque comme Louise Harel, Claude Charron et Gilles Duceppe.

« Ils étaient à l’époque des étudiants en pleine révolte », se rappelle-t-il. « Ça bougeait beaucoup. J’étais un lien avec les groupes des milieux politique, artistique et des marginaux », conclut-il.

Et puis un jour de décembre 1971, fringué comme un trappeur du Canada, il débarque à Lyon. « Pierre est arrivé à l’hôpital où je travaillais pour me retrouver. Il avait une veste carottée et une grosse barbe et des cheveux longs », se rappelle avec humour l’aide-soignante.

Pierre et Gianna au début des années 1970. Photo Courtoisie

Direction Les Bergeronnes

Arrivé en sol québécois le 16 août 1972, le couple réside à Sainte-Dorothée sur l’île de Laval où l’aide-soignante déniche un travail dans une garderie.

La nouvelle résidente perd toutefois son passeport lors d’un voyage en transport en commun, et le couple pense à s’échapper le temps d’un week-end pour aller faire du camping.

« Pierre a ouvert une carte routière et m’a dit de mettre mon doigt n’importe où. J’ai mis mon doigt sur Tadoussac », se rappelle avec bonheur Gianna Bella.

Arrivés sur place le 16 août 1973, les amoureux mettent le cap vers Les Bergeronnes puisque le « camping de Tadoussac était trop loin de l’eau », explique Gianna.

C’est le début d’un attachement profond, qui ne s’est jamais estompé jusqu’à aujourd’hui.

« On s’est arrêté à l’épicerie qui était dans le bassin à l’époque, et nous avons rencontré Ti-Louis Gagnon. En partant, nous avons vu une maison à louer en haut de la côte à bouleau », indique Pierre Rambaud.

« C’était 75 $ par mois pour la maison, et nous venions tous les deux mois passer du temps dans la région avant de nous établir de manière permanente en 1975 », conclut-il.

Au cœur du développement

Le milieu des années 1970 est une époque particulièrement fertile pour le couple qui accueille un enfant dans sa vie, et qui s’implique au niveau local et communautaire pendant plus d’une décennie.

C’est d’ailleurs à cette époque que l’on retrouve le nom de Pierre Rambaud dans l’ancêtre du journal, le Journal Plein-Jour.

Le couple s’implique à fond dans Communiqu’action, un projet destiné aux journaux communautaires que possédaient presque tous les villages au tournant des années 1980.

« On a créé un projet de développement communautaire qui s’appelait Communiqu’action, qui était financé par le gouvernement fédéral pour relancer les journaux qui existaient déjà », se remémore M. Rambaud.

En 1978, le projet Contact voit le jour. « C’est devenu un groupe de ressources techniques qui était financé par Ottawa », indique-t-il.

Les plus âgés se souviendront des initiatives régionales, comme la scierie Beaulieu et les serres So-Paul de Longue-Rive, les Artisans de la mer des Escoumins, et Tulinor aux Bergeronnes.

Les passionnés s’impliquent également au sein du journal bergeronnais Le Maillon, dont Gianna s’occupe de la rédaction et dans lequel Pierre signe maints articles.

« Non seulement on a suivi l’histoire des Bergeronnes, mais on y a participé », résume Pierre Rambaud.

Un bel accueil

Le couple réfléchit à haute voix sur ses 50 années de résidence aux Bergeronnes. « Quand je suis arrivée, j’ai eu le droit à toute une immersion dans la population, dans la culture des Bergeronnes et la culture québécoise », se souvient la Bergeronnaise d’adoption.

« Je trouve que les gens du village et de la région sont gentils, attachants et curieux », indique-t-elle. « Bien que nous avons gardé notre manière de penser européenne, nous n’essayions pas d’imposer notre culture », retrace-t-elle.

Pour sa part, Pierre Rambaud constate que leur intégration s’est somme toute bien déroulée, malgré le fait qu’ils « étaient un peu des marginaux », toutefois pas peu fiers d’avoir participé activement au développement du village.

Et le secret pour durer comme couple ? Pierre Rambaud prend à revers cette question amoureuse éternelle. « On ne dure pas, on s’endure », déclare-t-il avec humour.

« Nous ne sommes pas toujours d’accord, on s’obstine, mais on arrive toujours à se dire les choses honnêtement », ajoute-t-il.

Aujourd’hui, le couple s’adonne aux tâches extérieures avec légèreté et enthousiasme. « Pierre tond la pelouse, et je m’adonne au jardinage », souligne Gianna Bella avec le sourire.

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