Feux de forêt 2023 sur la Côte-Nord : Joachim Lecoutre dévoile l’envers du décor

Par Anne-Sophie Paquet-T. 9:00 AM - 31 octobre 2023
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Joachim Lecoutre à la base d’opérations de Baie-Comeau, où il a travaillé comme chef des opérations et officier de la région. Photo Isabelle Gariépy

Joachim Lecoutre est chef des opérations de la Société de protection des forêts contre le feu (SOPFEU) pour la région est de la province. Les feux de forêt 2023 auront été pour lui « du jamais vu », dévoile le pompier qui travaille pour la SOPFEU depuis 2012. Il raconte comment il a vécu cette période invraisemblable sur le terrain.

Des feux de forêt sans précédent, un brasier qui a marqué des millions de gens, c’est qui ressort de la dernière saison estivale. « C’était mur à mur dans l’ensemble de la province », dit d’entrée de jeu Joachim Lecoutre.

Un total de 1 539 688,1 hectares ont été brûlés en zone intensive et 3 580 256,7 hectares en zone nordique. Évidemment, la Côte-Nord a été touchée de façon extrêmement importante et des dizaines de feux ont éclaté sans être en mesure de les maîtriser.

Après 11 ans de carrière, M. Lecoutre n’a jamais vécu un épisode comme celui-là. « Il y a eu des feux de forêt une bonne partie de l’été en 2013, mais en matière de feu, ce n’était pas comparable à ce qu’on a vécu cette année », exprime-t-il.

Pendant cette longue période, Joachim Lecoutre, qui est chef des opérations au sein de la direction du secteur est, a dû alterner avec ses collègues afin de mettre le chapeau d’officier, soit celui qui gère régionalement la situation. Ces rôles importants étaient interchangés tous les sept jours.

« Dans le maximum de la situation, j’ai pu faire des journées de 15 à 16 heures, mais on cherche rapidement à faire maximum 12 heures par jour pour que ça soit soutenable », confie-t-il.

« Pour ma part, j’ai fait 11 jours d’affilée pendant cette période, mais je sais que d’autres de mes collègues ont fait beaucoup plus que ça », ajoute M. Lecoutre, précisant que la direction essayait de ne pas faire travailler les équipes plus de 10 jours de suite. 

Les feux multiples 

Lorsque les feux multiples ont débuté à Manic-3/Micoua, il était difficile pour les équipes de vivre avec ce sentiment « d’impuissance ».

« On sortait du travail et l’on voyait au loin le panache de feu de Micoua. On devait penser à garder notre calme et se rappeler qu’on devait travailler en marathon et non en sprint afin d’y arriver », se souvient-il.

Joachim Lecoutre se rappelle particulièrement du feu au nord de Sept-Îles qui était hors de contrôle et qui s’est avéré le balbutiement du malheur de la région. « Les intensités étaient à l’extrême. Dans ce genre de situation, une fois que le feu est hors de contrôle, on peut seulement tenter d’éviter qu’il prenne de l’ampleur quand il se rapproche des infrastructures », affirme-t-il. 

« Ces quatre premiers jours, nos yeux étaient tous tournés vers ce feu en plus d’un autre feu d’origine humaine qui nous a beaucoup mobilisés. Juste après, c’était l’épisode des feux multiples dans l’ensemble de la province », se rappelle-t-il.  

Des leçons à tirer 

« Avec le recul, je me remets encore parfois en question. C’est facile de dire qu’on aurait pu faire mieux. Sur le coup, on est dans la prise de décision de minute par minute », confie le chef des opérations. M. Lecoutre est tout de même convaincu que les décisions qu’il a prises lui-même et avec les équipes étaient les bonnes avec les informations qu’ils avaient en main. 

La SOPFEU a tiré plusieurs leçons afin d’améliorer les stratégies et l’équipement pour le futur. « Ça laisse un petit traumatisme en charge de travail », soutient celui qui aime encore beaucoup la mission et la raison de son travail. Il se dit fier de toute son équipe. 

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