Des scientifiques exhortent le Canada à reconnaître la «dégradation» des forêts
Photo Jonathan Hayward/ La Presse Canadienne
Une lettre signée par une centaine de scientifiques exhorte le gouvernement canadien à prendre des mesures concrètes pour mettre fin à la dégradation, par l’exploitation forestière industrielle à grande échelle, de forêts jusque-là intactes.
La lettre, signée par plusieurs éminents scientifiques canadiens et américains spécialistes du climat et des forêts, appelle également le gouvernement à aider, plutôt qu’à entraver, les politiques mondiales visant à freiner l’expansion industrielle dans les forêts anciennes et primaires — qui n’ont jamais été perturbées industriellement.
La lettre est publiée alors que le Canada s’apprête à rédiger sa propre définition de la «dégradation» des forêts, après que l’Union européenne a adopté une loi plus tôt cette année visant à limiter la disponibilité des produits qui contribuent à la déforestation et à la dégradation.
Les groupes environnementaux ont dénoncé les pressions exercées par le Canada pour que l’UE supprime de son projet de loi toute référence au terme «dégradation» des forêts.
Alors que le Canada s’est souvent vanté de son faible «taux de déforestation» – lorsque les terres forestières sont converties à un autre usage –, la lettre attire l’attention sur la «dégradation» associée à l’exploitation forestière des forêts anciennes et primaires, jusque-là épargnées par une activité industrielle à grande échelle.
Dans la lettre, rédigée par le scientifique en chef du groupe de conservation «Wild Heritage», établi en Californie, les spécialistes admettent que le terme «dégradation» des forêts n’a pas encore fait l’objet d’une «définition unique qui soit internationalement acceptée».
Mais selon les signataires, ce terme est largement compris comme faisant référence «aux impacts délétères sur les écosystèmes forestiers qui ne constituent pas des changements d’affectation des terres, mais qui les affectent négativement», notamment les espèces indigènes, la qualité de l’écosystème et les réserves de carbone.
«Nous exhortons maintenant le Canada à reconnaître et à s’attaquer à la dégradation des forêts sur son propre territoire, en utilisant une définition basée sur des indicateurs écologiques plutôt qu’économiques, et à soutenir plutôt qu’à entraver l’élaboration de politiques mondiales visant à mettre un terme à la dégradation des forêts», indique la lettre, rédigée par Dominick DellaSala.
Le Canada est signataire de la «Déclaration des dirigeants de Glasgow sur les forêts et l’utilisation des terres», qui engage les parties à mettre fin et à inverser la déforestation et la dégradation des terres d’ici 2030.
La lettre des scientifiques indique que la définition du Canada sur la «dégradation» des forêts devrait utiliser des «indicateurs écologiques», comme la perte de puits de carbone et le déclin de la biodiversité, plutôt que des indicateurs purement économiques.
«Correctement interprétée, la dégradation inclurait nécessairement les impacts industriels dans les forêts primaires et anciennes, ainsi que la conversion de forêts à régénération naturelle en plantations ou forêts plantées», estiment les spécialistes canadiens et américains.
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