Mois de l’arbre et des forêts : la forêt privée, un joyau à cultiver

Par Shirley Kennedy 7:00 AM - 15 mai 2024
Temps de lecture :

Une plantation photographiée après le dégagement de la compétition. Photo courtoisie Samuel Jalbert

Samuel Jalbert occupe le poste de directeur général du Groupement Agro-Forestier Côte-Nord depuis un peu plus d’un an. Avant d’accéder à ce poste, l’ingénieur forestier a œuvré pendant sept ans au sein de l’organisation à titre d’administrateur et de membre.

Bien qu’il ait dû faire face à des enjeux incontournables liés à ses fonctions, le gestionnaire peut affirmer qu’il a la mainmise sur ses dossiers et que la période d’apprentissage et d’adaptation est derrière lui. « Je m’attendais à ça puisque je connaissais bien le groupement en étant membre et administrateur depuis 2008. J’ai eu quelques défis mais j’aime mon travail, je commence à y prendre goût », dit-il.

En haute saison, le Groupement Agro-Forestier Côte-Nord dont le siège social est situé aux Escoumins, emploie autour de 6-7 personnes, plutôt concentrées sur l’administration et la gestion. La majorité des travaux-terrain sont effectués par des sous-traitants, comme la Coopérative forestière La Nord-Côtière par exemple.

« On se concentre bien entendu sur la forêt privée. Ce n’est pas une grosse partie du territoire en proportion de la forêt publique, ajoute le dirigeant. On a des membres surtout en Haute-Côte-Nord et un peu dans Manicouagan ».

Après la récolte, l’équipe du Groupement Agro-Forestier Côte-Nord s’assure du reboisement de la grande majorité des terrains. « On favorise le reboisement et on essaie d’offrir tous les travaux sylvicoles possibles », ajoute-t-il.

Bon an mal an, le Groupement Agro-Forestier de la Côte-Nord intervient sur une superficie estimée entre 100 et 150 hectares de forêt privée (hormis les dédoublements d’opérations) répartie au sein des 300 membres de l’organisation. « Ce sont vraiment des terrains uniques qui sont tout de même récoltés en harmonie avec le Plan d’aménagement forestier pour permettre au plus grand nombre de propriétaires d’être éligibles aux programmes de subvention. C’est pour cette raison qu’on garde à temps plein notre technicien pendant l’hiver, pour planifier les travaux à venir et accompagner les membres ».

Occupation du territoire et activité économique

L’occupation dynamique du territoire est à l’origine même de la création des groupements de propriétaires de lots privés explique Samuel Jalbert. « Le gouvernement à l’époque avait l’intention de fermer les villages et la mobilisation citoyenne avait mené à l’Opération Dignité. Les gens avaient dit aux décideurs politiques : on veut vivre des ressources naturelles qui nous entourent. C’est un des rôles principaux qu’on peut attribuer aux groupements. Si on n’aménageait pas de forêts privées, le groupement n’existerait pas. À la base c’était un moyen de créer une activité économique », relate-t-il.

Mode de vie

Le facteur de mise en valeur de leur patrimoine par les propriétaires justifie l’aménagement qu’en font des organisations comme le groupement. « C’est un actif dont on va prendre soin. Et s’ils veulent reboiser avec certaines essences, on peut les aider à choisir. L’aspect service-client est très important pour nous ».

Parlant des clients du Groupement Agro-Forestier Côte-Nord, le directeur général dresse un portrait positif du profil-type. On y retrouve des jeunes propriétaires néophytes dans le domaine et des lots qui se lèguent de génération en génération.

« Il y a des deux. Des jeunes de l’extérieur qui achètent des terres, c’est devenu plus recherché, en raison du mode de vie proche de la nature pendant et après la COVID. Et il y a aussi des héritiers, on voit ça souvent. Ils se disent : ça va rester dans la famille, on va mettre beaucoup de temps là-dessus, ça a une valeur sentimentale et ça se reflète dans la vie des communautés aussi. Moi et ma famille on a des lots. On organise des activités familiales, des méchouis, cueillette de petits fruits, randonnées, etc. C’est un mode de vie », raconte le Forestvillois.

Bien qu’une vague d’achat de lots privés ait été constatée au cours des dernières années, Samuel Jalbert ne parle pas de surenchère. « Si on regarde le marché provincial, la Côte-Nord est à la traîne. La demande est moins là. On n’est pas si populaire que ça démographiquement. Oui le marché est à la hausse mais pas à un rythme exagéré », commente-t-il.

Semences nord-côtières

Avec les changements climatiques, Samuel Jalbert estime qu’il y a matière à réflexion concernant les opérations de travaux sylvicoles. La provenance génétique des essences est un domaine qu’il expérimente actuellement.

« Est-ce que nos opérations sont adaptées aux changements climatiques? Par exemple, l’érable à sucre. Tout le monde en voudrait mais cette variété n’est pas appropriée à tous les sites et représente certaines exigences au niveau du sol. Le chêne rouge pousse sur un sol pauvre et sablonneux. Il ne retient pas beaucoup l’eau. L’érable à sucre indigène existe aux Escoumins et mon voisin de lot possède 3-4 érables à sucre indigènes à Forestville. J’ai trouvé du chêne rouge à la limite nord des Escoumins. J’aimerais ça propager cette génétique et créer des semences propres à la Côte-Nord », s’enthousiasme Samuel Jalbert.

Partager cet article