Bleuetières : l’expertise mexicaine importée chez nous

Par Shirley Kennedy 26 juillet 2016
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Originaire du Mexique où il vit toujours 4 mois par an, Marco Chabavria est issu d’une génération d’apiculteurs.

Longue-Rive – La pollinisation des bleuetières de la Côte-Nord est terminée depuis quelques semaines déjà, et la profusion de petites fleurs blanches en forme de clochette indique que la saison 2016 promet d’être aussi prospère que celle de 2015, alors que les producteurs nord-côtiers avaient produit 3 500 000 kg de bleuets nains sauvages. Marco Chabavria, chef d’équipe chez Intermiel, est du même avis. Les milliers d’abeilles gourmandes qu’il a transportées depuis Mirabel jusqu’à Longue-Rive, ont été particulièrement attirées par les plants de bleuets sauvages de nos bleuetières.

Originaire du Mexique où il vit toujours 4 mois par an, Marco Chabavria est issu d’une génération d’apiculteurs. Cinq décennies durant, son grand-père et son père avant lui, ont exercé le métier dans le Centre Estado de Mexico, où sa famille habite toujours.

Depuis dix ans, grâce au Programme de travailleur agricole saisonnier (PTAS) mis sur pied par le gouvernement canadien en regard de ses liens commerciaux avec le Mexique, Marco Chabavria travaille 8 mois par an au Québec.
Bien que l’entreprise Intermiel, ferme d’envergure reconnue à travers l’Amérique pour la qualité et la diversification de ses produits, bénéficie de l’expertise de M. Chabavria depuis dix ans, ce dernier est responsable de la pollinisation des régions de la Côte-Nord et du Saguenay-Lac-St-Jean depuis trois ans seulement. « Je fais la pollinisation des bleuets, de la canneberge, de la canola et du sarrasin, que l’on retrouve principalement à St-Félicien et St-Prime » , explique-t-il, dans un français plus qu’acceptable.

Des milliers d’abeilles

Marco Chabavria et son équipier, également originaire du Mexique, ont installé sur la Côte-Nord et au Saguenay-Lac-St-Jean, 6 500 ruches sur les bleuetières de Mario Tremblay de Longue-Rive mais également à la Coop St-Augustin, Les Bleuetières Senco, Bleuets Fortin & Fils et différentes productions situées notamment à La Doré, Ste-Jeanne-D’Arc, Ste-Marguerite, Ste-Élisabeth et Dolbeau.

« La pollinisation dure 21 jours. Je suis venu installer les ruches vers le 10 juin dernier et selon la quantité de fleurs, nous installons deux ou trois boîtes par ruche. Cette année, nous en avons installé trois », précise l’apiculteur mexicain, ajoutant que c’est le climat hivernal qui précède la saison qui détermine réellement l’issue de la floraison. Une couverture de neige insuffisante pour protéger les plants des grands froids ou du gel en juin sont les deux caprices de la nature les plus craints des producteurs.

L’avenir est bleu

Si l’on se fie aux prévisions des différentes associations de producteurs de bleuets de la province, le Québec devrait atteindre cette année ou à très court terme, les 100 millions de livres de bleuets. Cela est dû en partie au phénomène de rationalisation observé particulièrement sur la Côte-Nord et au Saguenay-Lac-St-Jean. Les grands producteurs achètent des terres. Résultat: le production de bleuets a doublé au cours des dix dernières années, selon la Monographie de l’industrie du bleuet sauvage que vient de publier le ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation du Québec.

Plusieurs facteurs justifient cette hausse exponentielle de la production nord-côtière: l’ajout de superficies importantes principalement en basse Côte-Nord et aussi la pollinisation qui a évolué. « Depuis 2006, je tiens des statistiques. Et à cette époque, ce n’était pas très courant, explique Guy Grenon, technicien agricole au ministère de l’Agriculture, des Pêches et de l’Alimentation (MAPAQ), région Côte-Nord. Les producteurs se fiaient davantage aux pollinisateurs indigènes. Mais les pauvres insectes indigènes ne fournissaient pas à la tâche. Alors graduellement, les producteurs sont allés chercher une expertise dans le domaine ».

Vive le Canada !

Marco Chabavria apprécie beaucoup sa nouvelle vie entre le Québec et son pays natal. Il ne regrette pas son choix même si celui-ci a mené à l’éclatement de sa famille. « J’ai un fils et je suis divorcé. Ma femme m’a dit: c’est moi ou le Canada et j’ai choisi le Canada ».

Très bien traité par l’entreprise qui l’emploie depuis dix ans, il est logé et un véhicule est mis à sa disposition. Comme à tous les ans, il rentrera au Mexique en novembre prochain et reviendra au Québec à la fin de février, après avoir profité de quatre mois de vacances chez lui.

 

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