Enseigner le dépassement de soi aux jeunes

Par Shirley Kennedy 5 juillet 2017
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Sacré-Cœur – Sarah Laprise est originaire de Sacré-Cœur. Elle enseigne les sciences aux élèves de secondaire I à III dans une polyvalente de Verdun, milieu très défavorisé de la région de Montréal. En mai dernier, le journal La Presse l’a élue Personnalité de la semaine parce qu’elle a aidé 14 jeunes à réaliser un rêve: remporter une compétition mondiale de robotique aux États-Unis.

Sarah Laprise fait partie de ces profs qui font la différence, ceux qui sont susceptibles d’influencer le parcours des jeunes à qui ils enseignent.

Disons que Sarah s’y connaît en matière de motivation, d’encouragement et d’estime de soi. Souffrant d’hémiparésie, une forme de paralysie partielle, parfois légère d’une moitié du corps, elle porte la différence depuis sa naissance alors qu’elle est née très prématurément il y a 42 ans, époque où les bébés prématurés n’avaient pratiquement aucune chance de survie. « J’ai eu un primaire horrible et un secondaire plus acceptable grâce à mes amis et à des enseignants qui voyaient beaucoup plus en moi que ma boiterie et mon œil croche..», confie l’enseignante de 42 ans à Marie-Claude Lortie de La Presse.

Vivre le rêve

Sarah Laprise s’applique tellement à faire la différence, qu’elle permet à 14 jeunes de secondaire I à IV d’aller au bout de leurs ambitions, d’accéder à la finale et de remporter grâce à une alliance avec deux équipes américaines, le concours FIRST Robotics aux États-Unis. Le robot des Robuck de Verdun est assez performant pour être remarqué par une équipe américaine qui termine la compétition au 4e rang. « Même si au final nous n’étions pas bien classés, les américains nous ont choisis pour conclure leur alliance parce que notre robot était très performant », explique-t-elle. Sur le thème À toute vapeur, le BB8 des Robuck doit simuler un dirigeable qui se prépare à l’envolée. Il envoie des balles dans un fausse chaudière, récupère des roues dentées dans la zone adverse, agrippe une corde et allume les lumières à la fin du match. Chaque mouvement réussi du robot des trois alliances rapporte des points à celle-ci. Finalement, l’impossible se produit: l’alliance formée des Robuck de Verdun ainsi que des deux équipes américaines de Brooklyn et de Latham décroche la bannière des champions tandis que le robot des jeunes de Verdun obtient le prix de la créativité.

Efforts et détermination

Sarah et son équipe (14 jeunes et 4 adultes dont des parents et un ingénieur à la retraite), ont fait la preuve que lorsqu’on y croit, qu’on met les efforts, tout est possible, bien que ce ne fut pas de tout repos. Pour réaliser cet exploit, Sarah s’est entourée de gens qui s’y connaissent en robotique mais elle a dû travailler fort pour financer le projet. « Ils veulent le refaire l’an prochain mais mon problème demeure le financement. Il a fallu ramasser 30 000 $ pour se rendre là. Ce n’est pas mon école qui peut payer ça. Même si nous avons gagné, cela n’assure par la pérennité du projet. Même chose pour le mentor, si je n’ai pas d’adultes, je n’y arriverai pas ».

Il y a deux semaines, le ministre québécois de l’éducation Sébastien Proulx, a invité Sarah à prendre part à une conférence de presse afin d’annoncer les nouveaux objectifs pour la réussite éducative. « J’y étais invitée puisque moi, deux autres enseignants et quelques personnalités avions participé au tournage d’une vidéo dans laquelle nous témoignions sur notre parcours et notre vision de la réussite éducative ».

La différence

En fait, Sarah croit beaucoup à la diversité en enseignement pour atteindre la réussite. Après 17 ans de carrière, elle est convaincue que tous les enfants n’apprennent pas de la même façon, avec les mêmes recettes. L’exploit réalisé par les Robuck de Verdun en est un exemple flagrant. Motivés et poussés à travailler fort, à se surpasser alors que la plupart ne sont pas des premiers de classe, ils ont tout de même réussi à briller.

« Pour être un bon prof devant 30 ados, il faut que tu sois solide avec ton estime de soi. Moi je voulais faire la différence. Je veux leur montrer que malgré tout, avec des efforts, on peut réussir et que rien ne peut les arrêter s’ils croient en eux. Que moi aussi je me suis déjà fait dire que je ne finirais pas mon secondaire. Mais que j’ai eu des profs extraordinaires: Julia Lavoie en français, Jean-François Bouchard et Renée Longue-Épée. Ces profs-là ont fait une différence pour moi ».

 

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