Projet GNL/Gazoduc : les audiences du BAPE n’ont pas répondu aux attentes

Par Johannie Gaudreault 3:00 PM - 29 septembre 2020
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Un méthanier par jour, plus précisément 400 méthaniers par année, utiliserait le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent et l’estuaire du fleuve Saint-Laurent pour transporter du gaz naturel vers les marchés européens. Courtoisie

Le Mouvement citoyen littoralement inacceptable faisait partie des groupes citoyens et organismes environnementaux qui ont participé aux auditions du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) concernant le projet GNL/Gazoduq du 21 au 25 septembre. Ce dernier s’inquiète des informations qui y ont été révélées, notamment en ce qui a trait aux impacts du projet.

Composé de membres résidents du secteur ouest de la Haute-Côte-Nord ainsi que de Baie-Sainte-Catherine, le Mouvement citoyen littoralement inacceptable déplore également la complaisance de la commission envers le promoteur et le manque d’experts indépendants lors de cette première partie du BAPE.

« Un des enjeux majeurs du projet est qu’il prévoit le passage d’un méthanier par jour, plus précisément 400 méthaniers par année, dans le parc marin du Saguenay-Saint-Laurent et vers l’estuaire du fleuve pour se rendre aux marchés européens. Ce passage quotidien aura un impact négatif sur les activités touristiques de la région et sur la beauté/calme de notre paysage », lance d’abord Marie Saint-Arnaud, co-porte-parole du Mouvement et résidente saisonnière de Tadoussac.

Selon cette dernière, la présence de GNL/Gazoduc (promoteurs du projet) se fera sentir de manière évidente. « Les navires marchands partiront de la baie des Ha! Ha! à La Baie et se dirigeront vers la pointe de l’islet à Tadoussac. Ils descendront vers Les Escoumins pour prendre l’estuaire du Saint-Laurent et longeront toute la côte jusqu’en Basse-Côte-Nord », précise-t-elle.

En plus des effets néfastes pour l’industrie touristique régionale, le groupe citoyen soutient les experts de Pêches et Océans Canada qui mentionnent que l’augmentation du trafic maritime prévue dans les prochaines années dans le fjord du Saguenay, entre autres à cause du projet GNL/Gazoduc, est incompatible avec le plan de rétablissement du béluga du Saint-Laurent.

« Le Groupe de recherche sur les mammifères marins (GREMM) étudie présentement le lien entre le bruit des moteurs et la disparition des bélugas, espèce en voie d’extinction, et le premier rapport d’étape qu’il a présenté est inquiétant. Ça vaut la peine d’attendre la fin de l’étude, en 2023 », de déclarer Marie Saint-Arnaud.

Ce projet va également à l’encontre de l’Accord de Paris, signé par le gouvernement du Canada, qui s’engage à réduire les émissions de gaz à effet de serre (GES) pour atteindre la carboneutralité d’ici 2050.

« Les scientifiques sont clairs : il faut laisser les hydrocarbures dans le sous-sol si le Canada veut atteindre cette cible. Avec GNL, nous deviendrons un pays exportateur de gaz naturel, c’est inconcevable », clame la co-porte-parole.

Complaisance

Les citoyens et groupes présents aux audiences dénoncent « un processus déficient comportant d’importantes lacunes qui discréditent le processus de consultation réalisé par le BAPE », peut-on lire dans le plus récent communiqué de la Coalition Fjord, autre regroupement qui s’oppose fortement à la réalisation du projet.

L’absence d’experts indépendants du promoteur pour répondre aux questions soulevées a donné le champ libre à GNL pour offrir des réponses incomplètes et subjectives, toujours selon la Coalition Fjord.

« Il n’a donc pas été possible de faire la lumière sur plusieurs aspects importants du projet, incluant ses impacts climatiques dans un contexte d’urgence climatique. Les commissaires devront se ressaisir en vue de la deuxième partie du BAPE en octobre. »

C’est donc à compter du 26 octobre que le deuxième volet des audiences, soit la présentation des mémoires, se déroulera. Le Mouvement citoyen littoralement inacceptable et la Coalition Fjord en déposeront chacun un.

Par la suite, la commission du BAPE devra fournir des recommandations au ministre de l’Environnement et de la Lutte contre les changements climatiques, Benoit Charrette, dans un délai de quatre mois suivant la fin de la consultation.

Qu’est-ce que le projet de GNL/Gazoduc?
L’entreprise GNL Québec souhaite construire une usine de liquéfaction de gaz naturel au port de Grande-Anse à La Baie, au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Le projet, évalué à environ 9 milliards de dollars, comprend également la mise en place d’un gazoduc souterrain de 780 kilomètres du nord de l’Ontario à Saguenay. Il permettrait d’acheminer du gaz naturel de l’Ouest canadien jusqu’à La Baie, où il serait liquéfié. Le projet de conduite est piloté par l’entreprise Gazoduq et sera analysé indépendamment par le BAPE.

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